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Le Bolchévik nº 193

Septembre 2010

Défendons les Palestiniens ! A bas le blocus de Gaza !

Massacre sioniste en haute mer

Soldats et colons israéliens, hors des territoires occupés !

1er juin – « C’est un assassinat. » Ces mots, prononcés par Greta Berlin, membre du Free Gaza Movement, disent l’horreur infligée par les commandos d’élite de la marine de l’Etat sioniste d’Israël, hier peu avant l’aube. Surgissant d’hélicoptères Black Hawk, ils se sont abattus sur un navire civil dans les eaux internationales, et ont ouvert le feu sur les 700 passagers qu’il transportait, dont une majorité de ressortissants turcs. Au moins neuf passagers du bateau turc Mavi Marmara – navire de tête d’une « flottille de la liberté » composée de six bateaux chargés de médicaments, de matériaux de construction et d’autres produits à destination de Gaza – ont été tués, et plusieurs dizaines d’autres ont été blessés. Les survivants ont été jetés en prison en Israël ou expulsés. Nous exigeons la libération immédiate de ces prisonniers !

Les passagers de la flottille d’aide aux Palestiniens ont courageusement défié l’embargo israélien de la bande de Gaza, imposé en 2007 comme une punition collective de la population palestinienne parce qu’elle avait voté pour les islamistes du Hamas. Gaza était déjà pratiquement un immense camp de concentration, encerclé de tous côtés par une barrière électrifiée, la mer ou la frontière fortifiée avec l’Egypte. Mais l’embargo a considérablement aggravé le sort des 1,5 million d’habitants de Gaza, qui dans leur immense majorité dépendent aujourd’hui, pour survivre, des maigres colis alimentaires distribués par les agences humanitaires des Nations Unies. Fin 2008 et début 2009, Israël a assassiné plus de 1 300 habitants de Gaza – dont beaucoup de femmes et d’enfants – quand des raids aériens menés 24 heures sur 24 et suivis par une invasion terrestre de plus de 10 000 soldats ont transformé une grande partie du ghetto de Gaza en champ de cendres et de décombres. Aujourd’hui même, un raid aérien israélien a tué trois personnes à Gaza.

Le gouvernement israélien affirme que les participants à la flottille sont des « extrémistes violents » et des « terroristes ». Pour la bourgeoisie chauvine de l’Etat-garnison sioniste, toute défense des Palestiniens assujettis est du « terrorisme ». Ce faisant, ils prennent aussi exemple sur leurs parrains impérialistes américains. Les Etats-Unis et les autres gouvernements capitalistes utilisent la « guerre contre le terrorisme » comme prétexte pour les massacres et la terreur d’Etat dirigés contre les opprimés un peu partout dans le monde. En fait, parmi les prétendus « terroristes » de la flottille figuraient des députés au Parlement européen et un diplomate américain à la retraite, ainsi que des écrivains et des cinéastes connus. Les Israéliens prétendent que les commandos ont ouvert le feu seulement après avoir été attaqués par des passagers. Ceci est démenti par de nombreux témoins oculaires, ainsi que par des vidéos de l’attaque. En tout état de cause, comme l’explique Greta Berlin, « les gens ont le droit de se défendre contre des soldats armés de mitrailleuses. »

De San Francisco à New York, de l’Europe au Proche-Orient, des manifestants ont défilé pour crier leur colère et dénoncer ce massacre. Aux Etats-Unis comme en Europe, les sections de la Ligue communiste internationale participent à ces manifestations. A Istanbul, en Turquie, des manifestants ont tenté de prendre d’assaut le consulat israélien. Nous disons : A bas le blocus qui affame Gaza ! Défendons le peuple palestinien ! Soldats et colons israéliens, hors des Territoires occupés, y compris de Jérusalem-Est !

Terroriser sans retenue les Palestiniens, c’est ce qu’a toujours fait la classe dirigeante israélienne et ses auxiliaires fascisants que sont les « colons ». Mais ces dernières années, les gouvernements israéliens mettent un point d’honneur à prendre pour cible les militants occidentaux qui défendent les Palestiniens. En 2003, deux activistes pro-palestiniens de l’International Solidarity Movement (ISM) ont été tués par les forces armées israéliennes : Rachel Corrie, une Américaine de 23 ans, a été écrasée par un bulldozer alors qu’elle tentait d’empêcher la démolition d’une maison palestinienne ; et Tom Hurndall, un photographe de presse britannique de 21 ans, a été abattu d’une balle en pleine tête par des soldats israéliens alors qu’il essayait de protéger des enfants dans le camp de réfugiés de Rafah, à Gaza. Hier, en Cisjordanie, Emily Henochowicz, une Américaine de 21 ans, a eu l’œil droit emporté par des tirs de soldats israéliens alors qu’elle manifestait contre le massacre du Mavi Marmara.

Sans surprise, le massacre israélien a été condamné par de nombreux gouvernements, à commencer par le régime du Premier ministre Erdogan en Turquie, organisateur non officiel de la flottille. Ces mêmes régimes capitalistes se sont révélés tout aussi capables que le gouvernement bourgeois israélien de perpétrer des atrocités contre les minorités ethniques, religieuses et nationales. Et pour ce qui est des impérialistes, ce sont la Grande-Bretagne et la France qui, entre les deux guerres mondiales, ont jeté les bases des malheurs qui continuent à accabler les Palestiniens et d’autres peuples du Proche-Orient en réprimant avec brutalité les soulèvements anticoloniaux et en dressant les peuples les uns contre les autres.

Pour sa part, l’administration démocrate du Président Barack Obama refuse ne serait-ce que de réprimander Israël. Washington est depuis des décennies le principal fournisseur d’armes de l’Etat sioniste, à qui il verse chaque année plusieurs milliards de dollars. A la veille du blitzkrieg israélien à Gaza, Obama, alors candidat à la présidence, avait clairement fait savoir, au cours d’une visite en Israël, que son administration continuerait à donner carte blanche à l’Etat sioniste pour son terrorisme anti-Palestiniens.

Dans la manifestation du 31 mai à New York, un des slogans les plus repris était « Obama, il est grand temps – mettez fin aux crimes de guerre israéliens ! » Mais l’administration Obama ne va pas mettre fin aux crimes de guerre israéliens, ni d’ailleurs aux siens propres. Que ce soit sous une administrations démocrates ou républicaines, c’est l’impérialisme américain qui est l’ennemi principal des travailleurs et des masses opprimées du monde entier. Aujourd’hui, il continue de perpétrer régulièrement des massacres contre les peuples d’Afghanistan et du Pakistan. Et quelques mois seulement après que Washington a profité du tremblement de terre en Haïti pour envoyer 20 000 soldats réoccuper ce minuscule pays pauvre et à population noire, la police du gouvernement jamaïcain a massacré plusieurs dizaines d’habitants des bidonvilles de Kingston sur l’ordre du gouvernement américain. A bas l’aide américaine à Israël ! Impérialisme US – bas les pattes devant la planète !

L’attaque israélienne contre une flottille humanitaire civile montre bien la futilité des efforts de tous ceux qui, dans la gauche réformiste, font pression sur les puissances impérialistes « démocratiques » pour qu’elles fassent pression sur Israël pour lui faire abandonner sa politique de répression meurtrière. Réprimer les Palestiniens est un élément constitutif de la cause sioniste, et ceci depuis son apparition en Europe dans la deuxième moitié du XIXe siècle, quand le sionisme s’est donné comme ersatz de mission messianique, celle de conquérir « une terre sans peuple pour un peuple sans terre ».

Quelles qu’aient pu être les intentions de certains des premiers immigrants juifs en Palestine, influencés par des idéaux socialistes, le projet sioniste a toujours signifié, en pratique, chasser un peuple de sa terre pour le remplacer par un autre. Plusieurs décennies d’accaparement de terres ont été suivies par l’expulsion en masse des Palestiniens en 1947-1948 et par la ghettoïsation des Arabes restés dans le nouvel Etat d’Israël. La conquête des territoires occupés, en 1967, a nourri le fantasme d’un « grand Israël » et de nouvelles évictions de Palestiniens à Gaza, à Jérusalem-Est et en Cisjordanie, qui est maintenant encerclée par un mur et parsemée de checkpoints de l’armée. Le gouvernement de droite du Premier ministre Benjamin Netanyahu inclut des personnages comme le ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman, qui prône ouvertement le « transfert » – l’expulsion génocidaire de tous les Arabes palestiniens.

L’universitaire américain antisioniste Norman Finkelstein a tapé juste quand il a décrit Israël, dans une interview à la chaîne de télévision Russia Today, comme « un Etat cinglé, avec entre deux et trois cents armes nucléaires, qui menace tous les jours de faire la guerre à l’Iran et au Hezbollah au Liban ». Il est intéressant de noter que le massacre à bord du navire turc a été perpétré deux semaines seulement après que les Etats-Unis et Israël avaient dénoncé un accord conclu grâce à la médiation de la Turquie et du Brésil pour fournir à l’Iran du combustible pour ses réacteurs nucléaires. Pendant que Washington cherche à renforcer l’embargo économique impérialiste contre l’Iran, Israël continue à parler ouvertement de bombarder ce pays. Ces menaces prouvent que l’Iran a besoin d’armes nucléaires pour se défendre contre les impérialistes et leurs partenaires subalternes.

Israël et la Palestine illustrent parfaitement la logique génocidaire du nationalisme bourgeois, particulièrement dans le contexte de peuples interpénétrés. L’émancipation nationale du peuple palestinien – y compris le droit au retour dans leur pays de tous les réfugiés et de leurs descendants – nécessite des révolutions ouvrières pour détruire de l’intérieur l’Etat sioniste et chasser les classes dirigeantes capitalistes des pays voisins, Syrie, Jordanie et Liban, qui elles-mêmes maintiennent sous leur coupe d’importantes populations palestiniennes. C’est seulement dans le cadre d’une fédération socialiste du Proche-Orient que les droits nationaux du peuple arabe palestinien et du peuple de langue hébraïque, ainsi que des Kurdes et d’une foule d’autres peuples, pourront être garantis.

Malgré le renforcement de la réaction ultra-chauvine et religieuse dans certaines couches de la population de langue hébraïque, et la montée du fondamentalisme islamique chez les Palestiniens et les autres populations arabes, les pays du Proche-Orient sont des sociétés divisées selon des lignes de classe. En particulier, l’Egypte a connu ces dernières années une vague de manifestations et de grèves ouvrières. Alors que les Egyptiens sont massivement solidaires des Palestiniens, le régime d’Hosni Moubarak, qui gouverne depuis des dizaines d’années sous l’état d’urgence, collabore activement avec le pouvoir sioniste pour maintenir le blocus de Gaza.

La solidarité des peuples du Proche-Orient avec le peuple palestinien opprimé doit être dirigée vers la révolution prolétarienne, contre leurs propres gouvernements ; qu’il s’agisse de nationalistes bourgeois ou de traditionalistes islamiques, ce sont tous fondamentalement des instruments de l’impérialisme occidental. Une lutte révolutionnaire en Iran et dans les pays arabes contribuerait, quant à elle, à arracher la classe ouvrière de langue hébraïque, qui compte de nombreux Juifs séfarades opprimés et pauvres, à l’intoxication du chauvinisme sioniste. Par ailleurs, pas moins d’un cinquième de la population d’Israël est composée d’Arabes palestiniens qui subissent depuis la naissance de l’Etat sioniste en 1948 une discrimination non dissimulée.

Il est dans l’intérêt de classe des travailleurs d’Israël de briser l’Etat capitaliste sioniste et de renverser leurs exploiteurs. Mais pour que ceci devienne réalité, le principe de classe doit l’emporter. Ce qu’il faut, c’est forger des partis ouvriers marxistes multinationaux et multiethniques dans tout le Proche-Orient, des partis construits en opposition à toutes les formes de nationalisme et de fondamentalisme religieux. De tels partis seront les instruments indispensables pour diriger une lutte victorieuse pour la révolution socialiste qui, à l’échelle internationale, ouvrira enfin la porte de l’égalité et de la libération de l’humanité.

Traduit de Workers Vanguard n° 960, 4 juin

 

Le Bolchévik nº 193

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