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	Le Bolchévik nº 210	Décembre 2014

LO : pour ou contre le djihad ? C’est selon

Nous reproduisons ici l’intervention de notre camarade Myriam Morin lors du « cercle Léon Trotsky » qu’avait organisé Lutte ouvrière le 14 novembre dernier à Paris sous l’intitulé « Moyen-Orient : la barbarie des djihadistes et celle de l’impérialisme ».

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J’interviens pour la Ligue trotskyste, journal le Bolchévik. Les impérialistes, américains ou français, sont les ennemis les plus barbares et les plus dangereux des travailleurs, des femmes et des opprimés du monde entier, y compris au Proche-Orient. Dans les métropoles impérialistes, les travailleurs doivent s’opposer à toutes les guerres et occupations de leur propre bourgeoisie. Nous disons : Troupes impérialistes, hors du Proche-Orient !

Toute force, aussi répugnante et anti-femmes soit-elle, comme l’Etat islamique, qui attaquerait ou repousserait les forces impérialistes ou leurs supplétifs locaux porterait aux impérialistes un coup dans l’intérêt des travailleurs et des opprimés du monde entier.

Aujourd’hui les forces nationalistes kurdes à Kobané notamment sont devenues les « troupes au sol » de la coalition impérialiste. Aussi, quand l’Etat islamique [EI] prend pour cible les impérialistes et leurs supplétifs, y compris les nationalistes kurdes syriens, les marxistes doivent se placer militairement du côté de l’EI, sans cesser d’être des ennemis résolus et déterminés des islamistes et de leur programme ultraréactionnaire.

LO [Lutte ouvrière] au contraire renvoie les impérialistes et l’EI dos à dos. Ils viennent de faire tout un discours sur le caractère réactionnaire des islamistes. Mais LO ne s’était pas gênée pour se mettre du côté des islamistes à la Ben Laden financés par l’impérialisme contre l’intervention soviétique en Afghanistan. En 1980 LO comparait cette intervention à la guerre du Vietnam. Nous, trotskystes, nous disions : Salut à l’Armée rouge en Afghanistan ! Etendez les acquis d’Octobre aux peuples d’Afghanistan !

Les militants de LO doivent réfléchir pourquoi LO s’oppose aux attaques des islamistes quand ils se mettent en travers des plans néocoloniaux des impérialistes capitalistes et pourquoi LO était du côté des islamistes quand ils attaquaient les forces de l’Etat ouvrier dégénéré soviétique. Dans les deux cas LO s’est retrouvée avec un, voire deux pieds dans le camp de sa propre bourgeoisie.

Or l’émancipation des opprimés du Proche-Orient exige le renversement du capitalisme et l’établissement d’une fédération socialiste dans toute la région. Pour qu’elle soit viable il faut porter la lutte révolutionnaire jusque dans les centres impérialistes. [La conclusion de l’intervention a été censurée par Lutte ouvrière.]

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En guise de réponse à l’intervention de notre camarade, la représentante de LO, Farida Megdoud, lui a cyniquement recommandé d’aller sur place rejoindre les islamistes. LO confirmait ainsi qu’elle ne peut même pas imaginer de chercher à mobiliser la classe ouvrière ici même contre les exactions de sa propre bourgeoisie impérialiste et du côté des victimes de celle-ci. On peut effectivement toujours attendre pour voir LO appeler les ouvriers en France à organiser même un rassemblement symbolique contre les bombardements français en Irak, de même qu’on attend toujours ses protestations dans la rue contre le bombardement français du Nord-Mali en 2013, de la Libye en 2011, ou de la présidence ivoirienne en 2010.

Sur le fond Megdoud a dit en substance que de toute façon cela remonte à loin et à longtemps, et qu’il faudrait aller aux archives. C’est dire l’intérêt de Lutte ouvrière pour les leçons politiques qu’apporte l’histoire à la classe ouvrière. Megdoud a larmoyé sur les populations afghanes quand elles ont vu les chars soviétiques arriver, et sur ce que ces populations ont alors enduré. Ce que ces populations ont « enduré », cela dépend : les femmes pouvaient ôter leur voile sous la protection de l’Armée rouge et aller faire des études à Kaboul et Moscou, alors que la vie était plus rugueuse pour les réactionnaires islamistes de la CIA. On voit de quel côté était LO.

Pour notre part, là où nous avons condamné les dirigeants soviétiques c’est quand sous Gorbatchev ils ont retiré leurs troupes, en 1988-1989, au nom d’une illusoire coexistence pacifique avec les impérialistes de Bush et Mitterrand. Le résultat a été la contre-révolution capitaliste jusqu’à Moscou à peine trois ans plus tard – et un pullulement sur toute la planète des réactionnaires et intégristes religieux de toutes sortes. Et depuis plus de vingt ans les peuples d’Afghanistan endurent guerres civiles, obscurantisme moyenâgeux des talibans et occupations impérialistes. La lutte contre la réaction religieuse est inséparable de la lutte pour renverser l’impérialisme capitaliste par la révolution ouvrière et réorganiser l’économie mondiale sur une base collectiviste dans l’intérêt des travailleurs et des opprimés.