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Le Bolchévik nº 205

September 2013

NSA, DGSE… L’Etat capitaliste surveille tout le monde

Impérialistes, bas les pattes devant Edward Snowden !

Nous reproduisons ci-dessous un article de nos camarades de la Spartacist League aux Etats-Unis, paru dans leur journal Workers Vanguard le 12 juillet. Le journal bourgeois libéral britannique Guardian est depuis menacé de fortes amendes (qui pourraient le mettre purement et simplement en faillite) parce que l’un de ses journalistes, Glenn Greenwald, avait osé publier quelques-unes des révélations faites par Edward Snowden. David Miranda, le compagnon de Greenwald, a été arrêté à l’aéroport de Londres-Heathrow et « questionné » pendant neuf heures par les services secrets anglais en vertu de la législation antiterroriste de ce pays ; le gouvernement a ordonné et directement supervisé la destruction de disques durs dans les locaux du journal pour tenter d’effacer les traces des crimes commis par les impérialistes et révélés par Snowden (le Monde, 21 août). La vraie nature de la « lutte contre le terrorisme », c’est de renforcer les pouvoirs de l’Etat contre la population, contre les musulmans et en dernier ressort contre la classe ouvrière.

Les services secrets français ne se distinguent apparemment de leurs partenaires anglo-saxons dans l’espionnage des individus que par une plus grande opacité. Il y a eu à peine quelques articles dans la presse capitaliste française. Un article mis en ligne le 13 juin sur le site de la chaîne de télévision belge RTBF avec la mention « RTBF avec le Monde » (mais qui n’a pas été reproduit dans l’édition papier du quotidien) avait dans un premier temps reconnu que 197 000 demandes de mise sur écoute étaient faites chaque année par différents services policiers (chiffres 2011-2012), soit une pour 300 habitants environ ! Dans son édition du 5 juillet, le Monde a ensuite révélé que l’intégralité, l’ensemble des communications de chacun, mails, SMS, relevés d’appels téléphoniques, accès à Facebook, à Twitter, étaient espionnés et pouvaient être ensuite « stockés pendant des années » par la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure). Le Monde ajoutait : « Ce Big Brother français, contrairement aux Etats-Unis où le programme de la NSA est secrètement validé par le Congrès, est totalement illégal. »

Edward Snowden a depuis la parution de cet article obtenu temporairement l’asile dans la Russie de Vladimir Poutine, mais les impérialistes occidentaux continuent de chercher à mettre la main sur lui. Nous disons : Impérialistes, bas les pattes devant Edward Snowden !

* * *

Le Guardian de Londres a publié il y a maintenant cinq semaines des articles rapportant que la National Security Agency (NSA) collecte en masse les relevés d’appels téléphoniques et espionne en grand l’internet. Pendant ce temps Edward Snowden, un ex-consultant de l’agence qui a fourni les documents, reste d’après tous les témoignages bloqué dans la zone de transit de l’aéroport de Moscou. Les impérialistes américains, piqués au vif par les révélations de Snowden, cherchent à lui faire payer le prix fort. Le Département d’Etat a annulé son passeport depuis plusieurs semaines pour l’empêcher de voyager : Washington veut le forcer à revenir aux Etats-Unis, où il est inculpé pour espionnage, vol et détournement de biens publics, et où il risque des dizaines d’années de prison. Le Venezuela, le Nicaragua et la Bolivie ont eu le mérite de lui offrir l’asile politique. Snowden, en mettant un peu plus à nu les rouages de l’appareil d’espionnage américain, a rendu un immense service à ceux qui sont la cible ultime de la répression capitaliste : les travailleurs et les opprimés, aux Etats-Unis et dans le reste du monde.

La rumeur a couru dans un premier temps que l’Equateur allait accorder l’asile à Snowden, mais son président Rafael Correa a fait machine arrière, déclarant le 27 juin qu’une telle demande ne pourrait être envisagée que si Snowden se trouvait sur le territoire équatorien. Cela faisait suite aux coups de fil du vice-président américain Joe Biden aux dirigeants des pays susceptibles d’accueillir Snowden. Ces pressions ont atteint un nouveau seuil la semaine dernière avec un sinistre acte d’arrogance impériale contre un pays pauvre visant Evo Morales, le président bolivien. Comme Morales avait annoncé à Moscou qu’il envisageait d’accorder l’asile à Snowden, l’Espagne, le Portugal, l’Italie et la France ont fermé leur espace aérien le 2 juillet pour bloquer son avion qui rentrait à La Paz ; ils prétendaient avoir des informations indiquant que Snowden était à bord. Il est clair que ces pays agissaient à la demande des Etats-Unis. L’appareil étant détourné de l’itinéraire préalablement autorisé, les pilotes craignaient de tomber à court de carburant, et ils ont dû atterrir à Vienne où l’avion a été bloqué au sol pendant 14 heures avant d’être autorisé à repartir.

L'ambassadeur de Bolivie auprès des Nations Unies a qualifié cela – à juste titre – d’acte d’agression. Le vice-président bolivien Alvaro García Linera a déclaré sans ambages que Morales avait été « séquestré par l’impérialisme ». La Bolivie a officiellement déposé plainte auprès des Nations Unies le 3 juillet, alors que Ban Ki-moon, le secrétaire général de cet instrument de l’impérialisme, avait la veille dénoncé Snowden pour « détournement » d’accès à l’information. L’incident a suscité une vague d’indignation en Amérique latine. La présidente de l’Argentine, Cristina Fernández de Kirchner, a dénoncé les « vestiges du colonialisme », ajoutant : « Nous croyons qu’ainsi a été humiliée non seulement une nation sœur, mais toute l’Amérique du Sud. » Les régimes populistes bourgeois du Venezuela, de l’Equateur et de l’Uruguay ont également protesté, tandis que les journaux et les commentateurs politiques rappelaient les siècles d’interventions, d’invasions et d’occupations américaines.

Les « démocraties » européennes se sont d’abord rengorgées qu’elles protégeaient des droits à la vie privée qui sont bafoués aux Etats-Unis, mais il s’est vite avéré que l’Allemagne cherche à accroître massivement ses capacités d’interception des communications, et que la France se livre au même genre de recueil de données à grande échelle que la NSA. Ces mêmes gouvernements ont poussé des récriminations le mois dernier, quand il est apparu que la NSA avait mis sur écoute leurs représentations diplomatiques à Washington, à l’ONU et à Bruxelles. Obama a eu un rare instant de franchise en déclarant que c’était chose ordinaire de s’espionner entre amis : « C’est ainsi que les services de renseignement fonctionnent. » Derrière les magouilles diplomatiques des impérialistes – qu’ils mènent parfois en commun, d’autres fois l’un contre l’autre –, il s’agit pour eux d’exploiter les travailleurs et les opprimés du monde entier en fonction de leurs intérêts respectifs.

Edward Snowden est un jeune homme courageux qui paie le prix fort pour avoir révélé au grand jour une partie des rouages cachés de l’Etat capitaliste. Parmi ceux qui ont levé le voile sur la machine d’espionnage du gouvernement à l’intérieur des Etats-Unis figure aussi Mark Klein, travailleur retraité de la compagnie de téléphone AT&T dans la baie de San Francisco ; il avait révélé il y a sept ans comment la NSA avait utilisé le réseau de fibres optiques d’AT&T afin d’accéder à la plus grande partie des flux de données sur Internet aux Etats-Unis. Le passage en cour martiale de Bradley Manning pour ses révélations sur la barbarie impérialiste américaine le montre aussi : si le gouvernement essaie d’arrêter et d’enfermer Edward Snowden, cela va de pair avec l’énorme renforcement des pouvoirs de police et l’élimination des libertés au nom de la « guerre contre le terrorisme ». Le fait qu’Obama et compagnie en veuillent à leur peau donne un aperçu de ce qu’ils réservent à quiconque envisage d’alerter l’opinion sur les crimes de la puissance impérialiste la plus dangereuse de la planète. Bas les pattes devant Edward Snowden !

 

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