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Le Bolchévik nº 217

Septembre 2016

Gauche française et Brexit : Soutien critique à l’UE ou chauvinisme populiste « de gauche »

Pour l’unité des travailleurs européens par-delà les frontières !

La position des marxistes en faveur du Brexit découle directement de l’analyse que nous faisons de la nature de l’Union européenne (UE). Si nous sommes opposés par principe à celle-ci, c’est parce qu’il s’agit d’une alliance capitaliste, dominée par les principales puissances impérialistes européennes, l’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne (jusqu’au Brexit), pour renforcer l’exploitation des travailleurs dans toute l’Europe. La raison d’être de l’UE, c’est de servir les intérêts de ces puissances impérialistes et de leurs partenaires juniors dans la concurrence internationale et d’utiliser les pays dépendants plus faibles, comme la Grèce et les pays d’Europe de l’Est, comme lieu de villégiature et/ou comme base arrière pour leur production industrielle (voir l’article de fond de nos camarades britanniques reproduit dans le numéro de juin du Bolchévik).

Cette forteresse raciste crée régulièrement de nouveaux mécanismes pour exclure les réfugiés et les immigrés, qui finissent par milliers noyés dans la Méditerranée. Ceux qui parviennent jusqu’en Europe sont détenus dans des camps de barbelés en attendant d’être renvoyés dans l’enfer de leur propre pays ravagé par les déprédations de l’impérialisme, ou dans le meilleur des cas ils sont surexploités et sous-payés, dans le but d’aggraver la pression à la baisse sur les salaires de tous. Pleins droits de citoyenneté pour tous ceux qui sont parvenus ici !

Mais l’UE est aussi une entité instable, soumise à d’incessantes tensions causées par la disparité des intérêts nationaux des diverses puissances impérialistes qui la composent. Ces tensions menacent de la faire exploser, et il ne peut en être autrement. Les forces productives ont depuis longtemps débordé du cadre national, mais le capitalisme demeure un système qui repose fondamentalement sur l’Etat-nation. Chaque classe capitaliste nationale a besoin de son propre Etat pour imposer et défendre ses intérêts, au niveau domestique et à l’étranger.

Et en fait c’est cette contradiction qui est à l’origine des deux dernières guerres mondiales. C’est pourquoi le soi-disant objectif d’une union politique ou d’un super-Etat européen est nécessairement une utopie. En évoquer la possibilité, c’est répandre des illusions dans la rationalité du capitalisme et détourner les travailleurs de la nécessité vitale de renverser ce système par la révolution socialiste. Comme le disait Lénine :

« Du point de vue des conditions économiques de l’impérialisme, c’est-à-dire de l’exportation des capitaux et du partage du monde par les puissances coloniales “avancées” et “civilisées”, les Etats-Unis d’Europe sont, en régime capitaliste, ou bien impossibles, ou bien réactionnaires. »

– « A propos du mot d’ordre des Etats-Unis d’Europe » (1915)

Le vote britannique du 23 juin pour quitter l’Union européenne a semé la consternation parmi les bourgeoisies européennes, et à tout le moins au sein de l’impérialisme français. Celui-ci s’appuie en effet depuis un quart de siècle sur l’Union européenne pour attaquer les acquis des travailleurs au nom des « directives de Bruxelles » sur la privatisation du rail, le statut des travailleurs détachés, etc.

C’est en invoquant des contraintes budgétaires imposées par l’UE que les gouvernements capitalistes français, de droite comme de gauche, procèdent au démantèlement accéléré des systèmes de santé et de retraite. Des institutions comme la Banque centrale européenne, avec sa monnaie l’euro, ont servi à ce que l’impérialisme français prenne plus que sa part au pillage de la Grèce et d’autres pays d’Europe de l’Est et du Sud, et à renflouer les banques françaises dans la crise financière et économique qui sévit depuis 2008. A bas l’UE, la BCE et l’euro !

C’est grâce à la « libre circulation des capitaux » que par exemple la SNCF a pu, au travers d’une filiale, prendre 35 % de Southern Rail, un morceau des chemins de fer britanniques privatisés (où la qualité de service est presque la pire de tout le réseau) ; dans cette entreprise s’est déroulée cet été une grève de plusieurs jours contre la tentative de liquider sur les trains régionaux les emplois de contrôleurs, qui notamment assurent la sûreté des voyageurs au départ des trains – le plan de suppression chez Southern Rail constitue un terrain d’expérimentation avant mise en œuvre ailleurs en GrandeBretagne, puis sans doute en France. La solidarité des cheminots français avec leurs frères de classe britanniques est plus que jamais cruciale pour faire plier la SNCF française !

Brexit : les partisans de l’UE au désespoir

On pourrait poursuivre indéfiniment sur les méfaits de l’Union européenne et la nécessité de lutter pour sa destruction. De notre opposition à l’UE résulte donc directement que la LTF, tout comme nos camarades britanniques, se réjouit du vote pour le Brexit ; il ouvre une situation plus favorable pour la lutte des classes de l’autre côté de la Manche, ici même et ailleurs sur le continent.

Telle n’a pas été la réaction de la gauche française, dont la détresse post-Brexit reflétait singulièrement celle de sa propre bourgeoisie. Lutte ouvrière par exemple affichait en titre dans son journal du 1er juillet, avec une photo de réactionnaires encravatés jubilant à la nouvelle du Brexit : « Grande-Bretagne : après le Brexit, un climat empoisonné » – en complet décalage avec l’appréciation de nombreux militants ouvriers mobilisés ce printemps dans les manifestations anti-El Khomri, auprès desquels notre ligne contre l’UE et en faveur du Brexit bénéficiait d’une réaction favorable.

Le PCF s’est une fois de plus fait remarquer pour sa défense d’une chimérique UE « sociale », son porte-parole Pierre Laurent écrivant le 24 juin, juste après l’annonce du résultat : « Avec nos alliés, nous travaillerons sans relâche à la construction de l’Europe du développement social, économique et écologique, respectueuse des souverainetés nationales. »

Le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) a de même fait campagne pendant des années pour une Europe « démocratique et sociale » (plus explicitement : social-démocrate), donc capitaliste, mais qui prendrait en compte les intérêts et désirs des travailleurs. Nulle part plus qu’en Grèce ce mythe du PCF et du NPA n’a été plus cruellement démenti par les faits. Cela fait des années maintenant que l’UE saigne la Grèce avec une férocité inouïe. Le NPA a pourtant misé gros en 2014-2015 sur le parti Syriza d’Alexis Tsipras, un parti bourgeois pro-UE. Ce soutien ne tenait pas du hasard : Syriza avait le même discours que le NPA sur la nécessité de lutter pour infléchir dans l’intérêt des travailleurs la mauvaise politique de l’UE contre la Grèce.

Tsipras, une fois élu en janvier 2015, s’est empressé de capituler ignoblement devant les impérialistes en juillet de la même année : après avoir convoqué un référendum sur le diktat austéritaire de la troïka emmenée par l’Union européenne, le FMI et la Banque centrale européenne (BCE), il s’est tout bonnement assis sur le résultat (près de deux tiers de votes « non ») et applique depuis les ordres de la troïka avec un zèle particulier contre les travailleurs et les pauvres de Grèce.

En dépit de son soutien à l’UE, le NPA a comme souvent fait entendre plusieurs sons de cloche au sujet du Brexit, avec même quelques marmonnements en faveur du Brexit (surtout après la victoire de celui-ci). L’une des multiples cliques qui grenouillent dans cette organisation, la « Tendance claire », a ainsi pris la pose comme s’ils étaient d’ardents opposants à l’UE. Concernant la Grèce, cette tendance a pourtant soutenu activement (avec quelques critiques pour faire pression sur elle) la coalition Antarsya, qui elle-même cherchait à faire pression sur Syriza, qui elle-même, etc. Typique de cette tendance. Aujourd’hui ce sont les travailleurs grecs qui paient pour la faillite de cette politique.

Neutralité hypocrite de Lutte ouvrière

Lutte ouvrière (LO) a sur le papier soutenu l’abstention, mais en réalité sa neutralité était plutôt bancale. Ses militants britanniques avaient une drôle de façon de défendre l’abstention, en déclarant que « la classe ouvrière n’a rien à craindre de l’UE » (voir aussi notre article « Brexit : LO fidèle au poste pour l’UE », le Bolchévik n° 216, juin). Leur commentaire post-Brexit était de la même eau : « Les travailleurs n’avaient rien à gagner à cet affrontement, ni d’un côté ni de l’autre. Ils ont, en revanche, déjà perdu » (Lutte de classe, juillet-août).

Le soutien de LO pour l’UE remonte à la fondation de celle-ci en 1992 : LO s’était abstenue lors du référendum sur le traité de Maastricht, contribuant ainsi à ce que le « oui » l’emporte de justesse. C’était une capitulation hypocrite face à la formation de l’UE, et donc à sa propre bourgeoisie impérialiste, grande bénéficiaire de ce bloc oppressif.

L’argument massue de LO contre le Brexit, c’est que celui-ci a renforcé l’extrême droite : « Se ranger dans le camp du Brexit revenait à conforter les préjugés anti-immigration et racistes, qui sont d’ailleurs distillés depuis fort longtemps par l’ensemble de la classe politique » (Lutte Ouvrière, 1er juillet). Etre pour le Brexit c’est être un gros raciste ?? Leurs propres camarades britanniques ont écrit sur le vote des ouvriers britanniques :

« S’ils ont voté pour le Brexit, ce n’est pas forcément l’expression de préjugés anti-immigrés, comme le disent tant de politiciens, mais parce que beaucoup y voyaient une occasion, la première depuis longtemps, d’exprimer leur ras-le-bol face à la dégradation de leurs conditions de vie et la politique anti-ouvrière du gouvernement Cameron. »

Lutte de classe, juillet-août

L’argument que le vote pour le Brexit renforce la réaction, et ici le FN, est complètement bidon. LO le sait parfaitement, sinon elle aurait dû faire son autocritique d’avoir voté avec le FN (mais pour une fois correctement) contre le traité constitutionnel européen lors du référendum en France en 2005.

C’est au contraire le soutien de Corbyn (le dirigeant travailliste) au maintien de la Grande-Bretagne dans l’UE, et le soutien de longue date du PCF, de LO, des bureaucrates syndicaux (Bernard Thibault, Jean-Claude Mailly…), etc., pour l’UE et ses soi-disant acquis qui ouvrent un boulevard aux réactionnaires et en France au FN. Cela permet en effet au FN de se présenter comme le seul opposant sérieux à l’Union européenne alors même que des pans grandissants de la classe ouvrière rejettent cette formation réactionnaire.

Les pro-Brexit et le chauvinisme français

Si LO peut essayer de dissimuler sous des prétentions « internationalistes » son soutien à l’UE de Hollande/Merkel, c’est qu’en France les partisans du Brexit ont essentiellement pris cette position correcte en se plaçant du point de vue d’un étroit nationalisme chauvin français. Alors que leur soutien au Brexit aurait dû contribuer à la lutte politique contre la démagogie du FN, ce nationalisme légitime les tirades du FN sur la souveraineté de la France.

Il en va ainsi des courants oppositionnels du PCF. Sur les quatre « textes alternatifs » proposés à son congrès de juin dernier, deux réclamaient de s’opposer clairement à l’UE et à l’euro (ils ont récolté au total près de 6 000 voix, soit le cinquième des votes). La plateforme n° 3 a ainsi comme mot d’ordre : « Sortir de l’UE et de l’Euro pour engager la sortie du capitalisme ! » Sauf que le reproche que ce courant, notamment implanté dans le Nord-Pas-de-Calais, adresse fondamentalement à l’UE, c’est qu’elle « efface les nations pour mieux imposer la domination du capital » et qu’elle « a donc aussi comme objectif de détruire les institutions nationales ».

La plateforme n° 4 (dont un représentant emblématique est Emmanuel Dang Tran du 15e arrondissement parisien) essaie d’éviter un chauvinisme aussi crasse. Elle déclare correctement que « l’euro, loin d’unir les peuples, les dresse les uns contre les autres et attise le nationalisme » et souligne à juste titre que l’euro « favorise les groupes capitalistes les plus forts, notamment en Allemagne (mais pas les travailleurs allemands) ».

Mais en fait cette plateforme regrette le tournant à partir de 1997, sous le gouvernement PS-PC-Verts de Jospin, qui avait « amené la direction du PCF à abandonner la défense de la souveraineté nationale et à envisager une réforme de l’UE, allant dans le sens de “l’Europe sociale”, indépendamment du droit de notre peuple à disposer de lui-même ». Ce genre de position reflète le point de vue d’une minorité de la bourgeoisie française qui voit son propre impérialisme en perte de vitesse faire trop de concessions à son rival allemand, de plus en plus dominant en Europe.

Logiquement, Dang Tran et ses camarades demandent des mesures protectionnistes en revendiquant « la rupture avec le “libre échange”, la concurrence déloyale et le dumping social imposés par l’UE et l’OMC ». Mais les mesures protectionnistes contre la « concurrence déloyale » attisent inévitablement le nationalisme en poussant les travailleurs à l’unité avec leurs propres capitalistes contre les concurrents étrangers (et les ouvriers des autres pays). Même la lutte contre le « dumping social » peut se faire en prônant l’exclusion des « plombiers polonais » – ou au contraire en luttant pour qu’ils soient payés avec les mêmes salaires et avantages sociaux que les travailleurs déjà installés en France et en les intégrant étroitement aux syndicats français. A bas la discrimination contre les travailleurs des pays de l’Est !

La classe ouvrière, pour prendre conscience de ses propres intérêts de classe, doit rejeter l’idée qu’elle partage quelque intérêt que ce soit avec la bourgeoisie qui l’exploite, que ce soit la défense des « emplois français » contre les travailleurs des autres pays, ou le « produire en France » dont Arnaud Montebourg se fait le héraut depuis qu’il était ministre de Hollande. Ce n’est pas « Bruxelles » qui exploite les travailleurs en France mais les capitalistes français (et les autres capitalistes installés en France), au besoin en se dissimulant derrière les « directives de Bruxelles ». L’unité nationale avec les capitalistes prépare de nouveaux sacrifices pour les travailleurs ici, tout en sapant la solidarité et le potentiel pour une puissante unité avec leurs frères de classe en Allemagne, en Pologne ou ailleurs.

En fait cette plateforme n° 4 ne cache pas sa sympathie pour le Parti communiste grec (KKE) qui a prouvé sa faillite dans la lutte contre l’UE en prônant l’abstention lors du référendum grec de 2015 (voir le Bolchévik n° 213, septembre 2015), et qui a récidivé en refusant de soutenir le Brexit sous prétexte qu’il ne conduisait pas directement au « pouvoir ouvrier-populaire ».

POI et POID, le poids du chauvinisme lambertiste

A notre connaissance, le seul groupe à part la LTF qui se soit vraiment prononcé en France pour le Brexit était le Parti ouvrier indépendant démocratique (POID), qui a organisé un « meeting internationaliste » pour le Brexit au mois de mai à Paris avec des militants notamment britanniques et allemands. Le POID représente une importante scission du POI lambertiste. Remontant à l’année dernière, cette scission emmenée par l’ancien chef du POI, Daniel Gluckstein, a porté en partie justement sur la question de l’Union européenne: le POID reprochait notamment au POI d’avoir capitulé en rase campagne face au soutien à l’UE de la haute bureaucratie syndicale de FO. Le reproche est indéniablement plus que juste et le POID (contrairement au POI) s’est bruyamment réjoui du Brexit.

Dès le début de la campagne pour le Brexit, le POID a condamné l’accord passé entre le désormais ex-Premier Ministre David Cameron et l’UE pour priver les ressortissants de l’UE en Grande-Bretagne de toute prestation sociale pendant les quatre premières années de leur immigration. Le POID a fait remarquer que cela « ne pourra amener qu’à une concurrence entre travailleurs, à une nouvelle offensive pour baisser le “coût du travail” des travailleurs britanniques, et à favoriser un climat xénophobe réactionnaire » (« Appel européen en soutien aux travailleurs britanniques qui voteront pour quitter l’Union Européenne », 9 mars). On ne peut mieux dire. Ce genre d’accord est en effet un parfait exemple de ce qu’est véritablement l’UE.

Mais la même déclaration du POID déclare aussi que le combat en France contre la loi El Khomri « est indissociable de celui que mènent les travailleurs britanniques qui pour retrouver leur souveraineté veulent gagner le référendum pour la sortie de l’Union Européenne ». De quelle « souveraineté » le POID parle-t-il ? La Grande-Bretagne n’est pas seulement un pays « souverain », c’est en tant que puissance impérialiste un pays exerçant une bonne dose de « souveraineté » sur les pays néocoloniaux au travers de son capital financier et de son militarisme à tout crin, surpasssé seulement par celui des Etats-Unis et de la France.

Quant à la « souveraineté » des travailleurs, dans la mesure où celle-ci peut avoir un sens réel, elle signifie le renversement de la bourgeoisie par la révolution ouvrière et l’instauration de la dictature du prolétariat, mais ce ne sont pas les réformistes sociaux-démocrates du POID qui vont parler de cela !

Effectivement, à part un « Frexit », le programme de lutte du POID se focalise sur « la reconquête de la démocratie politique à tous les niveaux » et pour une « Assemblée constituante qui, s’engageant sur la voie de la rupture, rendra au peuple le pouvoir de décider » (« Appel à la tenue d’une conférence nationale de travailleurs et de jeunes »). L’appel à une assemblée constituante n’est pas une revendication démocratique mais un appel pour un nouveau gouvernement capitaliste : ceci va à l’encontre de la lutte pour le pouvoir prolétarien (voir notre article « Pourquoi nous rejetons l’appel à une “assemblée constituante” », Spartacist édition française n° 41, été 2013).

Les POI, démocratique ou non, se revendiquent du même héritage lambertiste marqué depuis des décennies par une glorification continuelle de la république bourgeoise, ce qui se traduit par un chauvinisme français souvent strident. Le manifeste de fondation du POI en 2008 proclame « Non à la dictature de l’Union européenne ! », qui pour les lambertistes menace de destruction « les fondements juridiques de la société dans laquelle nous vivons depuis 1945 » – comme si ces « fondements juridiques » n’étaient pas ceux qui assoient la domination de la bourgeoisie impérialiste française sur la classe ouvrière !

Pourtant les lambertistes sont dédiés à la défense de ces « fondements juridiques » contre « la subordination et la transformation des institutions bonapartistes [de la Ve République] en rouages subsidiaires des institutions supranationales de l’Union européenne ». Le POI ne croit pas à une « Europe sociale » mais ce qu’il veut, c’est au mieux revenir au soi-disant « Etat-providence » capitaliste français de 1945.

D’ailleurs l’un des dirigeants du POID n’est autre que Gérard Schivardi, maire de village et candidat en 2007 au poste de chef des armées de l’impérialisme français pour le compte des lambertistes. Schivardi est l’un des promoteurs d’un récent « Conseil National de Résistance des communes et départements », dont le manifeste, qui fourmille de références à « notre idéal républicain », revendique haut et fort : « Oui, la République une, indivisible et laïque doit être rétablie. » Aux Kanaks, Corses, Basques opprimés par l’impérialisme français de se figurer comment cela pourrait ne pas les viser. Quant à la « laïcité » de sa République, Schivardi lui-même déclarait lors d’une interview en 2014 sur Roadsmagazine :

« Donc, pour moi, tout immigré doit suivre les règles et les traditions de notre pays. C’est-à-dire la laïcité, pas de signes extérieurs religieux et parler le français. Je suis prêt à accueillir tout le monde mais si on ne peut pas ou si idéologiquement on ne veut pas, on s’en va. Je suis contre la reconnaissance d’enfants nés en France qui deviennent automatiquement Français. »

Comment s’étonner que Schivardi se plaigne que Marine Le Pen « est en train de récupérer beaucoup de mes idées » ?

En attisant le chauvinisme français, les réformistes jouent exactement le rôle qui leur est prescrit dans cette Union européenne qui dresse les peuples les uns contre les autres pour diviser la classe ouvrière. Il faut comprendre que l’Union européenne n’est pas réformable. Si les syndicats sont partout en Europe sur la défensive, si les conventions collectives reculent dans de nombreux pays (Grèce, Allemagne, Belgique, Italie, France…), ce n’est pas du fait d’une politique qu’il faudrait modifier en faisant pression sur ceux d’en haut, mais parce que c’est l’essence même de l’Union européenne capitaliste. La loi El Khomri et autres attaques contre les syndicats et les travailleurs ont en fait eu leur préfiguration dans des mesures similaires imposées par l’Union européenne aux travailleurs grecs.

Il n’y aura pas d’Europe démocratique et sociale, l’UE doit être détruite par des révolutions ouvrières. La lutte pour des Etats-Unis socialistes d’Europe exige l’unité internationaliste des travailleurs des deux côtés de la Manche et sur tout le continent. Elle exige de lutter pour reforger la Quatrième Internationale qu’avait fondée Léon Trotsky en 1938.

Le Bolchévik nº 217

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Septembre 2016

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