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Le Bolchévik nº 190

Décembre 2009

Halte à la vendetta contre Roman Polanski !

Non à l’extradition !

Nous reproduisons ci-dessous la traduction d’un article de Workers Vanguard, journal de la Spartacist League/U.S., n° 944, 9 octobre.

* * *

32 ans après, le bureau du procureur du comté de Los Angeles vient de relancer sa vendetta contre Roman Polanski, réalisateur de cinéma mondialement connu. Avec le soutien du FBI, il a orchestré son arrestation, le 26 septembre dernier à Zurich. Roman Polanski, qui est âgé de 76 ans, est aujourd’hui détenu en Suisse dans l’attente d’une possible extradition vers les Etats-Unis, où il risque une peine de prison pour avoir eu des relations sexuelles mutuellement consenties avec une adolescente précoce de treize ans un jour de 1977.

Roman Polanski n’est coupable d’aucun crime. Face au risque d’un procès-spectacle hollywoodien avec plusieurs chefs d’inculpation graves, il avait plaidé coupable d’avoir eu « des rapports sexuels illégaux » avec une mineure. Menacé d’une peine d’emprisonnement supplémentaire alors qu’il avait déjà passé six semaines dans une prison de l’Etat de Californie pour « test diagnostic », Polanski, qui a la citoyenneté française, s’était enfui à Paris en 1978 pour échapper à cette chasse aux sorcières puritaine. Malgré une menace persistante d’extradition, il a persévéré face à la fatwa judiciaire américaine et est, jusqu’ici, parvenu à poursuivre sa carrière cinématographique en Europe avec succès.

Après son arrestation soudaine, beaucoup de gens se posent une question évidente : pourquoi maintenant ? L’affaire est vieille de plus de 30 ans, Polanski a plus de 70 ans, et il n’y a aucune « victime » à venger. Samantha Geimer, la femme impliquée dans l’affaire, a maintenant une quarantaine d’années et trois enfants, et elle s’oppose depuis longtemps aux poursuites contre Polanski. Et jusqu’à une date récente, les Etats-Unis n’avaient pas déployé beaucoup d’efforts pour obtenir l’extradition de celui-ci.

Dans une tribune publiée le 30 septembre par le New York Times, l’écrivain Robert Harris notait que la situation avait changé après la diffusion, en 2008, d’un documentaire intitulé Roman Polanski : recherché et désiré. Ce film contenait une interview de David Wells, à l’époque procureur-adjoint, au cours de laquelle il se vantait d’avoir alors prodigué des conseils sur l’affaire au juge Laurence Rittenband (aujourd’hui décédé), notamment sur comment faire en sorte que Polanski soit condamné à de la prison ferme. En se basant sur ce documentaire et sur d’autres éléments, les avocats de Polanski ont déposé un recours en annulation, qui a été rejeté en février dernier par le juge Peter Espinoza, du tribunal de grande instance de Los Angeles. Avec une logique perverse, Espinoza reconnaissait qu’il y avait eu « de graves irrégularités », mais refusait d’envisager l’annulation des poursuites tant que Polanski ne se serait pas présenté en personne devant son tribunal, où il aurait assurément été arrêté.

Le récit de la machination ayant été rendu public – y compris devant un tribunal – , les procureurs n’avaient rien à perdre en accélérant la traque contre Polanski. Wells a aujourd’hui de façon grotesque déclaré qu’il a menti devant les caméras et qu’il était persuadé que le documentaire ne serait jamais projeté aux Etats-Unis. Marina Zenovich, l’auteur du documentaire, a répondu que Wells avait en fait « corroboré la version des faits qu’il a présentée dans mon film » dans un article publié par le New York Times le 17 juillet 2008.

Les motivations des procureurs et des juges américains, menteurs et acharnés, sont assez claires ; mais le soudain empressement du gouvernement suisse à complaire aux autorités américaines en a étonné plus d’un. Après tout, cela fait plusieurs années que Polanski est propriétaire d’une maison en Suisse, où il se rend régulièrement. On murmure qu’en le livrant, les autorités suisses espèrent bénéficier en retour de l’indulgence du fisc américain qui enquête sur le géant bancaire helvétique UBS, soupçonné d’avoir aidé des citoyens américains à échapper à l’impôt. « Le gouvernement est tellement traumatisé par le fisc américain et tout ce scandale de l’UBS », explique l’ancien parlementaire socialiste suisse Jean Ziegler. « Si quelque agence américaine que ce soit demande quoi que ce soit en Suisse, elle l’aura dans les 24 heures » (Associated Press, 29 septembre).

Quelle que soit la machination que le gouvernement américain a ourdie contre Polanski, nous dénonçons aujourd’hui, comme nous l’avons fait dès le début, cette chasse aux sorcières scandaleuse. Aux Etats-Unis, la police des mœurs, à laquelle le New York Times s’est joint dans un éditorial du 30 septembre, hurle à la mort contre lui. En France, quand des membres du gouvernement ont critiqué son arrestation, ceci a provoqué des cris d’indignation de la part d’autres politiciens qui exigeaient que Polanski soit traîné devant la « justice » des Etats-Unis.

En même temps, Polanski a reçu le soutien d’autres réalisateurs, comme Martin Scorsese et Woody Allen, qui a lui-même été la cible d’une chasse aux sorcières anti-sexe (voir « Woody Allen immolé sur l’autel des “valeurs familiales” », Workers Vanguard n° 558, 4 septembre 1992). Mais parmi ceux qui défendent Polanski, beaucoup admettent qu’il aurait commis un « crime » en 1977. Et depuis cette époque, « la tolérance sexuelle a rétréci », comme l’a fait remarquer Alexander Cockburn dans CounterPunch (2-4 octobre), et l’hystérie sur la « pédophilie » s’est accentuée pendant que les lois réactionnaires concomitantes se sont multipliées.

Nous exigeons l’abrogation des lois réactionnaires sur « l’âge de consentement » et celles qui définissent automatiquement comme viol toutes relations sexuelles en dessous d’un certain âge. Ces lois assimilent, à tort, des relations sexuelles librement consenties à des crimes violents. Nous sommes contre toutes les lois contre les « crimes sans victimes » (qui incluent aussi le jeu, la prostitution, l’usage de drogues et la pornographie). Gouvernement hors des chambres à coucher ! Liberté pour Roman Polanski !

A l’époque des premières poursuites contre Polanski, nous étions pratiquement les seuls dans la gauche à le défendre. Nous reproduisons ci-dessous notre article « Halte à la chasse aux sorcières puritaine contre Roman Polanski ! » publié pour la première fois dans Workers Vanguard n° 192, 10 février 1978. Les questions politiques abordées dans cet article restent d’actualité, trois décennies plus tard.

* * *

Roman Polanski, réalisateur mondialement célèbre, a été chassé des Etats-Unis par une vicieuse chasse aux sorcières menée par des autorités déchaînées pour lui nuire. Sa mésaventure judiciaire a débuté le 11 mars de l’année dernière, quand il a été arrêté dans le hall de l’hôtel Beverly Wilshire par la police de Los Angeles, suite à la plainte déposée par une femme qui l’accuse d’avoir baisé sa fille de treize ans. Depuis ce jour, la persécution cauchemardesque s’est accélérée – Polanski a notamment passé 42 jours dans la prison de l’Etat de Californie à Chino, où il a subi des « examens psychiatriques » dégradants.

Polanski a récemment été libéré, au terme d’un « diagnostic psychiatrique » présenté comme « favorable ». Mais le juge du tribunal de grande instance Rittenband a immédiatement qualifié le rapport du diagnostic de « complaisant », et il a informé l’avocat du réalisateur qu’il avait l’intention de condamner Polanski à 48 jours de prison supplémentaires, qui seraient suivis d’une « expulsion volontaire ». « Il n’a rien à faire dans ce pays », proclame ce gardien autoproclamé de la morale nationale. Polanski, qui a la citoyenneté française, a fui le 1er février à Paris, où il demeure maintenant, tandis que le procureur cherche à obtenir son extradition.

Rittenband, bien connu localement comme juge à la main lourde, veut de toute évidence faire de Polanski un exemple. Douglas Dalton, l’avocat du prévenu, souligne que sur les 44 personnes reconnues coupables en 1976 dans le comté de Los Angeles sur la base d’accusations similaires, aucune n’avait été emprisonnée. L’ex-procureur général de l’Etat de Californie Younger a aussi cherché à exploiter politiquement cette affaire dans le cadre de sa campagne « sécuritaire ».

La presse nationale a couvert cette affaire avec un mélange de pieuse indignation et de mépris sarcastique devant ce nouveau « scandale hollywoodien » typique. L’hebdomadaire Time (28 mars 1977) évoquait ironiquement les « ennuis crapuleux » du réalisateur, tandis que le quotidien New York Post (2 février) consacrait une pleine page au « nouvel Hollywood » et à la « bande de racailles » des amis branchés sexe de Polanski, présenté comme une espèce de détraqué exotique et névrosé. Ce n’est pas la première fois que l’Etat, avec les encouragements de la presse à scandale, chasse d’Hollywood des personnalités de premier plan. Errol Flynn, unanimement considéré comme un homme charmant qui n’avait jamais fait de mal à personne, a été traîné maintes fois devant les tribunaux du fait de son goût bien connu pour les femmes jeunes.

Au plus fort de la chasse aux sorcières maccarthyste, Ingrid Bergman avait été attaquée au Congrès des Etats-Unis parce qu’elle avait osé souiller l’image de sainte qui lui avait été conférée à l’écran pour son rôle dans « Jeanne d’Arc » : elle avait eu un enfant hors mariage avec le réalisateur italien Roberto Rossellini. Charlie Chaplin a lui aussi été chassé du « pays où tout est possible » – en grande partie, bien sûr, pour des raisons politiques, mais aussi avec une bonne dose d’insinuations sexuelles. Une presse en manque de scoops publie périodiquement des « révélations » sur le monde enchanté d’Hollywood, ce qui permet d’émoustiller le public – confiné pour la plupart à une existence monotone, pauvre et étriquée – et en même temps de canaliser son ressentiment envers les gens riches et célèbres vers une indignation morale gratifiante mais stérile.

Ce qui est vraiment « crapuleux » et sordide dans l’affaire Polanski, ce ne sont pas les faits eux-mêmes, mais l’ignoble persécution officielle et l’hideuse hypocrisie de tout cela. La presse nationale a soigneusement « omis » de rapporter ce qui s’est réellement passé. Le 8 août, le réalisateur a plaidé coupable d’avoir eu des rapports sexuels illégaux avec une mineure, en échange de l’abandon des autres chefs d’inculpation, dont viol, attentat à la pudeur sur mineure, rapports sexuels bucco-génitaux, sodomie et fourniture de drogue à une mineure. Mais les déclarations faites au cours du procès montrent clairement que ce qui s’est passé n’était absolument pas un viol !

La jeune fille de treize ans que Polanski est accusé d’avoir violée est décrite dans le Los Angeles Times (20 août 1977) comme une « aspirante actrice » dont la mère connaissait Polanski depuis plus d’un an, et l’avait autorisé à prendre des photographies de sa fille pour l’édition française du magazine Vogue. Une de ces séances de photographies avec le célèbre réalisateur s’est transformée en soirée passée à boire du champagne, à se baigner nus dans un jacuzzi et, pour ce qui est de la jeune femme, à consommer une portion de Quaalude (un sédatif à la mode). Après cela, il y a eu un rapport sexuel (ce que la presse traduit par « droguer et violer »).

Mais devant le tribunal, il a été révélé que la jeune femme avait fait « l’expérience » du Quaalude depuis l’âge de dix ou onze ans, et qu’elle avait un petit ami de 17 ans avec qui elle avait eu auparavant des rapports sexuels. Un policier enquêtant sur l’affaire la décrit comme faisant « entre 16 et 18 ans », tandis que sa mère l’a une fois décrite maladroitement comme « précoce quand elle est avec de grandes personnes ». Même le juge Rittenband, dans son rapport justifiant le sursis, a été forcé de reconnaître la maturité sexuelle évidente de la fille : « La plaignante était une jeune fille bien formée, qui faisait plus que son âge, et qui, il faut le regretter, n’était pas ignorante en matière de sexe. »

Cet incident a eu lieu au domicile de l’acteur vedette Jack Nicholson, et c’est en partie sur la base du témoignage de sa colocataire actuelle, Angelica Huston, qui était rentrée chez elle plus tard dans la soirée, que Polanski a été inculpé. Bien sûr, l’empressement qu’elle a mis à coopérer avec la police pourrait bien être lié au fait que les enquêteurs qui ont fouillé l’appartement à la recherche de « preuves » avaient trouvé une dose de cocaïne dans sa chambre.

La vie sexuelle et sociale en Californie du Sud, avec sa culture de la drogue florissante et les hordes de groupies précoces et sexuellement actives gravitant aux franges de l’industrie du spectacle, produit des milliers d’« aspirantes actrices » (et de jeunes hommes qui aimeraient devenir des « rock stars »), comme celle que Polanski a eu la malchance de rencontrer. Quelle que soit l’opinion qu’on peut avoir de ce qui s’est passé ce soir-là, le caractère par trop évident de la scène montre l’absurdité des efforts de Rittenband pour imposer la morale rigide de l’époque victorienne sur les boulevards et dans les chambres à coucher de Los Angeles.

La répression des activités sexuelles par les institutions et les normes qu’elles imposent ont apporté oppression et souffrance dans toute l’histoire, depuis le cruel « droit de cuissage » médiéval jusqu’à la réglementation dans les moindres détails des différents péchés sexuels par l’Eglise catholique et au déni victorien complet de la sexualité des femmes et des enfants et le prolongement artificiel de l’enfance qui va avec. Les « normes » sexuelles que l’Etat américain défend aujourd’hui puent l’hypocrisie, dans une société où la recherche scientifique sur la sexualité humaine commence seulement à faire l’objet de publications non confidentielles, où les avancées scientifiques dans le domaine de la contraception ont écarté la peur légitime de tomber enceinte, qui depuis les temps immémoriaux constituait un obstacle au plaisir sexuel, et où les tabous rigides basés sur l’ignorance ont perdu beaucoup de leur force.

Toutes les lois qui aujourd’hui aux Etats-Unis définissent les « crimes sexuels » visent fondamentalement à exalter et à renforcer la prison obscène et répressive de la famille, qui depuis des siècles est la principale institution d’oppression des femmes et des enfants. Les opinions réactionnaires attisées par la persécution des « pervers sexuels » sont aussi nourries par la perception de la famille comme un refuge pour l’individu dans un monde hostile. Seule une vision sociale plus large du remplacement de la famille qui se produira finalement dans le cadre de la transition vers une société sans classes pourra apaiser la crainte que la lumpenisation et l’écroulement de la société seraient les seules alternatives à la morale bourgeoise.

L’exploitation de l’affaire Polanski par les médias est plus que du simple sensationnalisme. Son inculpation, comme l’hystérie autour de la « pornographie enfantine », apportent de l’eau au moulin de la campagne bien-pensante pour « sauver nos enfants », dont la manifestation la plus caractéristique est la chasse aux sorcières anti-homosexuels menée par Anita Bryant – une offensive réactionnaire qui se cache derrière « l’innocence » des enfants pour imposer la morale bourgeoise en pourchassant les « pervers » avec acharnement.

La persécution de ceux qui sont considérés comme une menace pour les normes dominantes de vie familiale prend souvent les formes les plus extrêmes. En novembre dernier, une princesse âgée de 23 ans et son mari roturier ont été exécutés comme « criminels sexuels » en Arabie saoudite. Selon les traditions de sa tribu, qui se trouve être également la classe dirigeante saoudienne, sa mise à mort par un peloton d’exécution et la décapitation de son mari à l’épée sur un marché public de Djedda étaient, socialement parlant, parfaitement « morales ». Le juge Rittenband n’a pas réussi à obtenir la décapitation de Polanski afin de protéger le « mode de vie américain », mais le principe que l’Etat a le droit d’imposer une « norme » en matières d’activités sexuelles privées est défendu tout aussi fermement par la bourgeoisie américaine que par les cheiks bédouins. Ce sont simplement les méthodes qui diffèrent un peu.

De nombreux crimes sexuels bien réels sont perpétrés aujourd’hui aux Etats-Unis, mais ce ne sont pas seulement ni nécessairement ceux qui font la une de la presse à scandale. On impose aux plus jeunes peur, culpabilité et répression simplement pour avoir eu des pensées sexuelles. Les adolescents subissent une ségrégation sexuelle inhumaine et artificielle dans les écoles et les universités. Les restrictions religieuses imposées par l’Eglise catholique et les autres sectes religieuses, dont le judaïsme orthodoxe, maintiennent des milliers de femmes dans un cycle sans fin de pauvreté et de grossesses, avec toujours davantage de bouches à nourrir. Les vieux sont enfermés jusqu’à leur mort dans des chambres sinistres et exiguës, et leurs geôliers débattent pour savoir si « le sexe doit être autorisé dans les maisons de retraite ».

Du fait de l’ignorance et de la honte, des milliers de jeunes femmes pauvres sont contraintes à recourir à des avortements dangereux, sans l’aide médicale publique, alors que les riches, comme toujours, se débrouillent facilement. Les moins chanceuses doivent soit porter des enfants non désirés, soit se faire stériliser définitivement dans les hôpitaux publics, tandis que le débat fait rage pour savoir si les jeunes doivent être « exposés » à l’information sur la contraception et le contrôle des naissances. Il y a aussi la frustration et les tensions sexuelles horribles qui s’accumulent au sein même de la famille, avec comme conséquences les violences physiques et les mauvais traitements, y compris sexuels, contre les enfants. Le viol et ces autres crimes bien réels, ainsi que la prostitution, qui est l’éternelle compagne de la monogamie forcée, sont la réalité sordide qui se cache derrière la « morale publique ».

On a fait de Polanski la dernière cible publique en date des efforts acharnés de l’Etat pour imposer le mythe puritain et cacher cette réalité. Même ses films brillants et souvent forts, comme « Cul-de-sac », « Le couteau dans l’eau », « Répulsion », et plus récemment « Rosemary’s baby » et « Chinatown » ont été utilisés contre lui. Comme le déplorait un responsable des studios Columbia Pictures, « Roman a tellement mauvaise réputation comme réalisateur pervers qu’il va être condamné par ses films » (Time, 28 mars 1977).

Ce que révèle au contraire la vie de ce réalisateur, c’est une suite de réalisations créatives réussies face à une longue série de violences et de tragédies. Enfant, Polanski a vu ses parents lui être arrachés par des SS (ils ont disparu dans les camps). A 15 ans, il a été presque tabassé à mort par un déséquilibré à coups de barre de fer. Après s’être fait un nom comme réalisateur de talent dans la Pologne stalinienne, il a émigré à l’Ouest – où sa femme, l’actrice Sharon Tate, alors enceinte, a été massacrée dans des conditions abominables, avec plusieurs amis du couple, par la démente « famille » Manson. Et aujourd’hui Polanski a subi l’humiliation et la torture de passer plus d’un mois en prison pour subir des « examens psychiatriques ». (Si cela c’était passé en Union soviétique, où les dissidents sont enfermés de façon barbare dans des hôpitaux psychiatriques, le réalisateur figurerait déjà en bonne place sur la liste de la campagne des « droits de l’homme » de Jimmy Carter.)

Mais pour l’Etat de Californie, Polanski est un « criminel sexuel » qui risque des peines supplémentaires de prison. Pas étonnant que la victime ait choisi de quitter l’Amérique. Comme il l’a très justement expliqué, « Ils ont passé 42 jours à essayer de me rendre bizarre, mais dieu merci je suis intelligent et riche » (New York Post, 7 février). Il ajoutait :

« En Amérique, en Californie, j’ai perdu ma femme, mon bébé, mes amis, peut-être ma santé mentale et presque ma liberté. Non, je dis non ! Les nazis n’ont pas pu me la prendre, le chagrin de ce que j’ai perdu non plus. Et cette petite pute et les lois de Californie n’y arriveront pas non plus. J’ai beaucoup donné, et ils m’ont trop pris. »

Très bien ! Nous sommes rassurés de voir que ce qu’il a subi pendant cette chasse aux sorcières puritaine n’a pas brisé Roman Polanski.

L’affaire Polanski a remué les peurs empoisonnées et la répression perverse qui sous-tendent la morale bourgeoise. En tant que communistes, nous sommes contre toute tentative d’enfermer la sexualité humaine dans des « normes » votées ou décrétées. Le principe gouvernant les relations sexuelles entre individus doit être celui du consentement effectif – autrement dit, rien de plus que l’accord et la compréhension mutuels, par opposition à la coercition. Nous soutenons que toutes les formes de relations mutuellement consenties entre individus sont exclusivement leur affaire, et que l’Etat n’a pas à interférer dans les activités sexuelles humaines.

Levée des inculpations contre Roman Polanski ! Non à l’extradition ! Halte à la chasse aux sorcières puritaine !

 

Le Bolchévik nº 190

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