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Le Bolchévik nº 202 |
Décembre 2012 |
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Le droit de manifester en danger
A bas la chasse aux sorcières raciste des flics contre les islamistes !
Le mouvement ouvrier doit défendre les jeunes de banlieue !
Nous reproduisons ci-après un tract de la LTF en date du 18 septembre contre l’interdiction par le gouvernement capitaliste Hollande/Valls de la manifestation islamique du 15 septembre, en protestation contre le brûlot raciste l’Innocence des musulmans.
Quelques jours après cette interdiction, le journal « satirique » Charlie Hebdo (19 septembre) essayait de faire son beurre avec cette affaire en publiant à son tour une série de croquis bêtes et méchants contre les musulmans. Le rédacteur en chef du journal, Charb, qui publie aussi ses dessins à l’occasion dans le quotidien du PCF l’Humanité, se fendait dans ce numéro de Charlie Hebdo d’un billet spécial à propos d’un incident survenu à la Fête de l’Humanité le 15 septembre. Un groupe de militants de gauche, emmenés notamment par des militants des « Indigènes de la république », protestaient contre Caroline Fourest qui prenait part à un forum sur comment lutter contre le Front national.
Fourest est une journaliste social-démocrate, ex de Charlie Hebdo, ex-éditorialiste du Monde et abonnée des plateaux télévisés. Elle s’est fait un nom avec des tirades enragées contre les femmes voilées et le « fascisme vert », contribuant ainsi à la loi raciste de Chirac en 2004 qui refoulait des écoles « républicaines » les jeunes femmes portant le foulard islamique. On voit mal en effet comment ce genre de personnage, attisant l’islamophobie, qui en France n’est que la face « laïque » du racisme anti-Maghrébins, pourrait prétendre contribuer à l’endiguement de la montée du fascisme et du Front national dans ce pays.
Pourtant la protestation des Indigènes contre Fourest a suscité un tollé de Jean-Luc Mélenchon et, encore plus hystérique, de Charb. Dans le numéro spécial antimusulmans du 19 septembre de Charlie Hebdo, Charb traitait de « fascistes » les Indigènes et regrettait que le service d’ordre du PCF n’ait pas ressorti pour l’occasion les pratiques du passé, quand il tabassait sauvagement les trotskystes ou autres opposants à sa politique réformiste de trahison ! Charb écrivait :
« L’organisation de la fête a, hélas, décidé d’évacuer Fourest pour des raisons de sécurité. Une trentaine de fachos arrive donc à saboter un débat dans une fête rassemblant des milliers de communistes
A une époque, les fachos, à la Fête de L’Huma, on les bouffait en merguez. Réveillons-nous, camarades ! »
Nous ne pouvons que nous féliciter que le PCF, cette fois-ci, n’ait pas agi selon les fantasmes pogromistes de Charb. De traiter les « Indigènes de la république » de « fascistes » montre seulement à quel point ces laïcards républicains sont de fidèles relais de la campagne raciste contre les musulmans.
Les Indigènes sont des libéraux petits-bourgeois, en bonne partie des intellectuels français d’origine algérienne, dont l’un des initiateurs les plus connus lors de leur lancement en 2005 était un sociologue respecté, Saïd Bouammama. Ils dénoncent avec un zèle louable le racisme de l’Etat français « postcolonial », mais au fond ils ont pour toute alternative que la république capitaliste française
devrait cesser d’être raciste. Dans leur texte fondateur « Appel des Indigènes de la République » (février 2005) ils demandaient ainsi à l’Etat français meurtrier de tant d’Algériens, de juifs et de tant d’autres de « promouvoir des mesures radicales de justice et d’égalité qui mettent un terme aux discriminations racistes dans l’accès au travail, au logement, à la culture et à la citoyenneté ». C’est propager des illusions dans la réformabilité du capitalisme français, qui s’est bâti tout spécialement sur le massacre et l’exploitation des Algériens pendant plus de 130 ans sous le colonialisme, suivis de 50 ans de sujétion néocoloniale de l’Algérie et de terreur et de discrimination racistes contre les Algériens et leurs enfants en France. La terreur raciste est inhérente au système capitaliste. Pour l’éradiquer, il faudra renverser tout ce système par une révolution ouvrière, en France et au-delà. Pour les Etats-Unis socialistes d’Europe !
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18 septembre 2012 La récente diffusion sur Internet de l’Innocence des musulmans, un répugnant brûlot sur le prophète Mahomet, était une provocation raciste consciemment calculée pour susciter la colère des musulmans de par le monde. Des protestations ont éclaté partout, notamment dans le monde arabe mais aussi à Paris, où environ deux cents manifestants, pour la plupart des jeunes de banlieue inorganisés encadrés par quelques salafistes, ont cherché à manifester le 15 septembre près de l’ambassade américaine place de la Concorde, et près de l’Elysée où en général toutes les manifestations sont interdites.
Les flics, prétextant que la manifestation n’avait pas été préalablement autorisée, se sont livrés à une véritable chasse à l’homme dans Paris, procédant à environ 150 interpellations soit les trois quarts des manifestants. Le nouveau ministre des flics social-démocrate, Manuel Valls, a déclaré qu’il n’allait pas en rester là et qu’il allait poursuivre les organisateurs supposés de la manifestation, qui sont passibles de six mois de prison et 7 500 euros d’amende. Cette attaque policière est une menace directe contre le droit de manifester et plus spécifiquement contre le mouvement ouvrier.
En envoyant les flics contre les manifestants du 15 septembre, le nouveau gouvernement capitaliste de front populaire de Hollande/Valls se place en droite ligne de ses prédécesseurs sarkozystes à moins que la hargne policière de Valls ne soit encore plus grotesque que celle de Brice Hortefeux et Claude Guéant. Valls est allé jusqu’à déclarer à l’AFP : « Je ne permettrai pas [...] que des slogans hostiles à des pays alliés, à nos valeurs, puissent se faire entendre dans nos rues. » Ce fanatique va-t-il profiter de cette affaire pour interdire non seulement les manifestations, mais même des slogans contre des crimes commis par l’impérialisme américain en Afghanistan, ou par l’Etat sioniste contre les Palestiniens, ou par Athènes et Bruxelles contre les travailleurs grecs ?
Le président Hollande a pour commencer son quinquennat mis en exergue ses « valeurs » en rendant hommage à Jules Ferry, qu’on surnommait à l’époque Ferry-Tonkin pour son exaltation colonialiste ; Valls va-t-il au nom de ses « valeurs » interdire les manifestations contre les crimes commis par les troupes françaises en Libye ou en Côte d’Ivoire, ou contre les camps de rétention à Mayotte où meurent les bébés ? Tout le mouvement ouvrier, et bien au-delà, est menacé par les scandaleuses déclarations de cet individu. Gouvernement PS-Verts, bas les pattes devant le droit de manifester ! Abandon immédiat des poursuites judiciaires contre les participants et les organisateurs supposés de la manifestation pro-musulmane du 15 septembre !
Valls a même profité de l’occasion pour sortir un projet de loi « antiterroriste » datant pour l’essentiel de Sarkozy. Cette loi prolongerait pour trois ans les libertés extraordinaires de la police politique pour espionner les communications téléphoniques et sur Internet et pour poursuivre devant les tribunaux des délits d’opinion « djihadiste » exprimés sur la toile. Là où Claude Guéant disait qu’« on ne criminalise pas une intention » lors de l’affaire Merah, Valls, lui, veut criminaliser les voyages en Afghanistan ou au Pakistan. Nous avions mis en garde que le programme de Hollande, c’était de faire du sarkozysme sans le bling-bling, et, contrairement au PCF, au NPA et même à LO, nous avions appelé à ne pas voter pour le front populaire de Hollande. A bas les mesures racistes « antiterroristes » du gouvernement ! Elles ont pour seul but de renforcer l’appareil répressif visant la classe ouvrière. La police, ce sont les chiens de garde du capital. Comme l’écrivait le dirigeant bolchévique Lénine :
« La société civilisée est scindée en classes hostiles et, qui plus est, irrémédiablement hostiles, dont l’armement “autonome” entraînerait une lutte armée entre elles. L’Etat se forme ; il se crée une force spéciale, des détachements spéciaux d’hommes armés, et chaque révolution, en détruisant l’appareil d’Etat, nous montre de la façon la plus évidente la lutte de classe toute nue, comment la classe dominante s’efforce de reconstituer les détachements spéciaux d’hommes armés qui la servaient, et comment la classe opprimée s’efforce de créer une nouvelle organisation de ce genre, capable de servir non les exploiteurs, mais les exploités. »
C’est pourquoi l’Etat capitaliste ne peut pas être réformé pour servir les intérêts des travailleurs, interdire les licenciements, ou autres fantaisies de réformistes. Il faudra le détruire par une révolution ouvrière qui instaurera le pouvoir des conseils ouvriers, selon le modèle des soviets de la Révolution russe de 1917.
L’offensive du gouvernement capitaliste contre les jeunes de banlieue décrétés « salafistes » se place en droite ligne des attaques de l’été contre les jeunes des cités d’Amiens et contre les Roms. Il cible spécialement des couches isolées et marginalisées, victimes d’un chômage astronomique, pour dresser les travailleurs les uns contre les autres, selon leur religion ou leur origine ethnique. Le but est à la fois d’affaiblir la classe ouvrière et de renforcer l’arsenal policier contre le mouvement ouvrier tout entier car seul le mouvement ouvrier a la puissance sociale et l’intérêt historique pour en finir avec le système capitaliste.
Les salafistes sont bien des réactionnaires obscurantistes anti-femmes. Notre organisation internationale a une longue tradition de lutte contre l’intégrisme islamique. Nous avions par exemple salué l’Armée rouge soviétique en 1979 quand elle était intervenue à la demande du gouvernement afghan pour stopper un soulèvement de mollahs moyenâgeux qui voulaient restaurer de force la burqa avec les armes et l’argent de la CIA et du régime wahhabite saoudien. Le voile symbolise dans toutes les religions l’oppression des femmes, qui elle-même prend sa source dans la propriété privée des moyens de production et dans la famille. Mais nous nous sommes toujours opposés à l’interdiction du voile par l’Etat bourgeois. En France c’est une mesure raciste contre les femmes et les jeunes musulmans ; nous avions mis en garde il y a deux ans que la loi sur la burqa allait être utilisée aussi contre les jeunes de banlieue portant une cagoule. Nous nous opposons aussi aux mesures légales contre le blasphème, qui sont régulièrement réclamées en France par l’Eglise catholique. Ce genre de loi représente un danger car l’Etat les utiliserait en premier lieu pour poursuivre et réprimer tous ceux qui s’opposent à la réaction religieuse.
L’arriération religieuse dans les banlieues est le produit de l’oppression, du chômage et de la terreur raciste des flics, ainsi que du refus du mouvement ouvrier de défendre les jeunes contre la ségrégation raciste omniprésente : elle donne une illusoire consolation céleste pour la misère bien réelle sur terre. C’est pourquoi la lutte contre l’arriération religieuse est inséparable de la lutte pour éradiquer sa cause, l’oppression capitaliste. La bourgeoisie est bien consciente de l’atout que représente la religion pour détourner les opprimés d’une lutte ici même pour leur émancipation sociale ; d’ailleurs les impérialistes français viennent l’année dernière, sous Sarkozy, de jouer un rôle moteur avec les Etats-Unis et l’OTAN pour installer au pouvoir en Libye des réactionnaires islamistes, avec le soutien direct ou voilé de la gauche française. Troupes françaises, hors d’Afrique, d’Afghanistan, du Liban et d’Abou Dhabi !
Ne pas défendre ces jeunes, sous prétexte qu’ils étaient emmenés par des réactionnaires salafistes, ce serait donner carte blanche à l’Etat bourgeois pour ses transparentes manuvres de division : la classe ouvrière doit prendre la défense de tous les opprimés en butte à la répression. Cela pose la nécessité d’un parti bolchévique multiethnique, multiracial, un parti ouvrier d’avant-garde sachant « réagir contre toute manifestation d’arbitraire et d’oppression, où qu’elle se produise, quelle que soit la classe ou la couche sociale qui ait à en souffrir, sachant généraliser tous ces faits pour en composer un tableau d’ensemble de la violence policière et de l’exploitation capitaliste, sachant profiter de la moindre occasion pour exposer devant tous ses convictions socialistes et ses revendications démocratiques, pour expliquer à tous et à chacun la portée historique de la lutte émancipatrice du prolétariat » (Lénine, Que faire ?). Défense du droit de manifester ! A bas la chasse aux sorcières raciste des flics contre les islamistes ! Le mouvement ouvrier doit défendre les jeunes de banlieue !
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