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Le Bolchévik nº 179

Mars 2007

Un innocent victime d’une machination

Il faut mobiliser la puissance du mouvement ouvrier !

Libération de Mumia Abu-Jamal !

Traduit de Workers Vanguard, journal de nos camarades américains, n° 886, 16 février.

* * *

L’effort urgent pour revitaliser le combat pour libérer Mumia Abu-Jamal était, en décembre dernier, au cœur du gala de soutien de fin d’année (Holiday Appeal) organisé par le Partisan Defense Committee (PDC) pour collecter des fonds au profit des prisonniers de la guerre de classe. Mumia, porte-parole du Black Panther Party dans sa jeunesse, par la suite partisan de l’organisation MOVE et journaliste primé, a été la cible d’une machination, accusé à tort d’avoir tué Daniel Faulkner, un policier de Philadelphie, le 9 décembre 1981. Il a été condamné à mort explicitement pour ses positions et ses activités politiques. Alors que le dossier de Mumia arrive en ce moment devant la Cour d’appel fédérale (Troisième circuit), le combat pour sa libération est entré dans une phase décisive. Son avocat, Robert Bryan, annonçait récemment dans une lettre aux partisans de Mumia que le tribunal lui avait notifié en novembre dernier que les plaidoiries étaient prévues pour janvier, mais que « cela a ensuite été annulé ». Une décision peut tomber d’ici quelques semaines ou quelques mois.

Les manifestations organisées dans le cadre des galas de soutien de fin d’année du PDC venaient après une série de rassemblements organisés en octobre dernier sur les mots d’ordre : « Libération immédiate de Mumia ! Mumia est innocent ! La vie de Mumia Abu-Jamal est en danger – mobilisons-nous maintenant ! Abolition de la peine de mort raciste ! » Dans les jours qui ont précédé et suivi ces rassemblements, une page de publicité a été publiée dans le Nation, l’Amsterdam News de Harlem, le Chicago Defender et le San Francisco Bay View, avec la liste de centaines de syndicalistes, d’universitaires, d’auteurs et d’autres personnalités qui avaient signé une déclaration diffusée à l’initiative du PDC affirmant l’innocence de Mumia et exigeant sa libération immédiate. Des publicités ont par la suite été publiées dans l’Humanité [30 janvier], le journal du Parti communiste français, dans le Morning Star en Grande-Bretagne, et dans des journaux allemands et canadiens.

Cette publicité (reproduite dans Workers Vanguard n° 880, 10 novembre 2006) affirme clairement « Tant les tribunaux de Pennsylvanie que les tribunaux fédéraux ont refusé de prendre en considération la montagne de preuves documentées qui démontrent l’innocence de Mumia. En premier lieu il y a les aveux sous serment d’Arnold Beverly qu’il a lui-même, et non Mumia, tiré sur l’agent de police et l’a tué. » Parmi les personnalités signataires figurent le professeur Henry Louis Gates, Jr. ; les écrivains Alice Walker, John Wideman, et les prix Nobel Dario Fo et Nadine Gordimer ; l’artiste de hip-hop Chuck D. de Public Enemy ; Charles Barron du conseil municipal de New York, et le membre du Congrès pour l’Illinois Danny K. Davis. Parmi les signataires du mouvement syndical on trouve la section new-yorkaise de la Coalition of Black Trade Unionists [Coalition des syndicalistes noirs], des sections locales de l’Amalgamated Transit Union [syndicat des transports en commun] et de l’International Longshoremen’s Association [syndicat des dockers], et la section locale Est 1199 de New York du SEIU [syndicat des travailleurs de la santé]. La diversité des signataires de la déclaration montre le potentiel de mobilisation pour des manifestations de masse sur la base que Mumia est innocent, la victime d’une machination raciste et politique.

Ceux qui luttent pour la libération de Mumia doivent comprendre l’intensité de la haine du pouvoir capitaliste pour cet homme qu’on appelle « la voix des sans-voix ». La vendetta impitoyable de l’Etat capitaliste contre ceux qui luttent pour la libération des Noirs s’est révélée avec l’arrestation, en janvier, de huit anciens membres du Black Panther Party, accusés d’avoir tué un flic à San Francisco il y a plus de 30 ans. Ces accusations ont été rejetées à plusieurs reprises par des jurys de mise en accusation et, dans l’une de ces affaires, jugées irrecevables par le tribunal parce que les « aveux » avaient été extorqués par la police sous la torture (voir « Protestons contre la rafle d’anciens Black Panthers par le gouvernement ! », Workers Vanguard n° 885, 2 février). Le fait que Mumia est la cible principale de l’Etat, c’est ce que montre la résolution adoptée à une écrasante majorité en décembre dernier par la Chambre des représentants [le Parlement] et qui condamnait la décision de la ville de Saint-Denis, dans la banlieue parisienne, de donner son nom à une rue.

Grâce aux réunions et meetings de Los Angeles, de Chicago, de l’agglomération de San Francisco, de Toronto et de New York, ce sont plus de 10 000 dollars qui ont été récoltés pour les 16 bénéficiaires du fonds de soutien aux prisonniers de la guerre de classe du PDC. Outre Mumia, y figurent huit membres de l’organisation MOVE de Philadelphie, les anciens partisans des Black Panthers Mondo we Langa et Ed Poindexter, Jaan Laaman et Thomas Manning des « 7 de l’Ohio », le dirigeant de l’American Indian Movement Leonard Peltier, le fils de Mumia, Jamal Hart, et le défenseur des droits des prisonniers Hugo Pinell. Chacun de ces cas illustre le fait qu’il n’y a pas de justice à attendre des tribunaux bourgeois pour quiconque est perçu comme un opposant du pouvoir capitaliste raciste.

Nous reproduisons ci-dessous la transcription, revue pour publication, de la présentation de Rachel Wolkenstein, avocate pour le PDC, lors de la réunion du 17 décembre 2006 à New York.

* * *

Nous ne pouvons pas nous bercer de l’illusion que ce soit une grande chance pour Mumia que son appel doive bientôt être présenté devant la Cour d’appel (Troisième circuit) qui examine trois (et seulement trois) motifs de réclamation sur plus d’une vingtaine présentés. C’est une bonne chose que la Cour d’appel examine ces recours. Mais il est aussi probable qu’ils ne font que préparer le terrain pour la conclusion finale que Mumia doit être exécuté.

Avant ma première rencontre avec Mumia, il y a presque vingt ans, avec Paul Cooperstein, lui aussi membre du Partisan Defense Committee, en août 1987, Mumia nous avait envoyé une citation d’Henry VI [de Shakespeare] selon laquelle la première chose que nous ferons après avoir pris le pouvoir sera de tuer tous les avocats. Nous lui avons envoyé en retour une citation de V.I. Lénine qui avait une tonalité négative similaire sur les avocats.

Le travail que j’ai accompli, aux côtés d’autres camarades du Partisan Defense Committee, a été, parallèlement à l’assistance judiciaire, de diffuser de la propagande, de faire connaître l’affaire Mumia, d’organiser des actions de protestation centrées sur la mobilisation de la puissance sociale du mouvement syndical, de la classe ouvrière, qui a le seul réel pouvoir de changer quelque chose. Nous basons notre travail sur la certitude que la seule manière de se débarrasser de l’injustice qui existe dans cette société, c’est par la révolution socialiste, et dans le cadre de ce processus nous devons lutter bec et ongles pour la libération de Mumia, et pour tous les droits démocratiques. Les exactions du système capitaliste ne s’arrêteront pas, le système capitaliste ne sera réformé d’aucune manière durable. Le seul changement fondamental qui est possible, c’est un changement de système social, ça veut dire le socialisme.

Mumia n’est pas marxiste. Mumia n’est pas socialiste. Mais il a toujours été absolument inflexible dans son opposition à l’oppression raciste, aux excès du capitalisme, aux injustices, à l’impérialisme américain. C’est la raison pour laquelle il est la cible des dirigeants de ce pays qui voient en lui le spectre de la révolution noire. Ils ont vu ça en lui dès ses débuts comme membre du Black Panther Party, dès qu’il est devenu un défenseur de l’organisation MOVE, pour ses déclarations incessantes en défense des Noirs, et pas seulement des Noirs, contre l’Etat capitaliste. Et pour toutes ces raisons, l’Etat capitaliste – les tribunaux, les procureurs, les politiciens bourgeois – sont déterminés à faire exécuter Mumia, ou à l’enfermer dans l’enfer sur terre qu’est la prison à vie.

Nous avons d’énormes défis à relever. Donc cette réunion, pendant laquelle nous nous détendons, nous dansons et nous écoutons de la merveilleuse musique, doit être comme un répit, et une manière de nous remettre en ordre pour la bataille cruciale : empêcher l’exécution de Mumia et obtenir sa libération. Je voudrais insister que des millions de personnes, dans le monde entier, ont depuis des années pris fait et cause pour Mumia. Ils l’ont fait sur la base du travail du Partisan Defense Committee, affilié à la Spartacist League, et de la Labor Black League, ainsi que de beaucoup, beaucoup d’autres organisations qui ne partagent aucunement les positions politiques du PDC. Parmi elles, l’organisation MOVE, les différentes coalitions pour libérer Mumia, Equal Justice et Noelle Hanrahan du Prison Radio Project, et beaucoup d’organisations au niveau international. Mais nous sommes les seuls à être conscients que l’Etat capitaliste ne peut pas être réformé, et que le cas de Mumia, pour toutes les raisons que nous avons indiquées, incarne à lui seul la question du racisme, la question de classe et la lutte pour notre libération à tous.

Dans le monde entier, des personnes se sont identifiées à Mumia et à sa cause parce qu’elles rejetaient viscéralement toutes les injustices inhérentes au capitalisme – pauvreté, guerre, discriminations raciales et ethniques. Pour toutes ces choses, elles voyaient en lui un symbole. Bien qu’il soit enfermé en isolement cellulaire 23 heures sur 24, sept jours sur sept, Mumia n’a cependant jamais abandonné ses convictions et son combat contre les injustices du système.

Ce qu’il faut souligner ici, c’est ce qui se passe quand vous êtes dans la rue en train de réclamer un nouveau procès sur la base qu’on peut faire pression sur les tribunaux pour qu’ils soient équitables. D’autres organisations politiques qui se prétendent socialistes, comme Socialist Action, l’International Socialist Organization et Workers World, savent parfaitement que de telles revendications sont en contradiction avec le fait d’être conscient que le capitalisme doit être renversé. Ces groupes réformistes colportent des illusions selon lesquelles les tribunaux pourraient être réformés, que nous pourrions compter sur les tribunaux pour qu’ils rendent justice, jusqu’à un certain point. Eh bien, les tribunaux vont réagir, mais seulement quand ils craignent des actions de masse, en particulier l’action de la classe ouvrière organisée, avec son pouvoir de faire grève. C’est ce genre d’agitation sociale qui les pousse à apporter certaines améliorations au système.

Très tôt, des preuves de l’innocence

J’ai travaillé avec l’équipe d’avocats de Mumia depuis environ 1995 jusqu’à juin 1999. Avant cela, au PDC, nous faisions de notre mieux pour aider Mumia à avoir de bons avocats. Nous avons aussi fait campagne pour bien faire savoir qui était Mumia – un membre du Black Panther Party, un partisan de MOVE, un militant noir et un journaliste. Le Partisan Defense Committee est convaincu de l’innocence de Mumia. Et fondamentalement, les preuves de l’innocence de Mumia qui ont été découvertes pendant la période qui va de 1995 à 2001 sont le résultat du travail que nous avons fait. Pas parce que nous sommes de grands avocats, ou les plus expérimentés, mais parce que nous savions que l’Etat avait ourdi une machination contre Mumia, et que celui-ci est innocent.

Les preuves étaient là, tout simplement. En 1995, un homme du nom de William Singletary a témoigné lors d’une audience pour Mumia. Singletary est un Noir, qui n’était pas un homme de gauche, mais un vétéran du Vietnam propriétaire d’une société de dépannage, qui avait souvent affaire avec les flics, et il était au coin de la rue, dans le Centre-Ville, quand Daniel Faulkner s’est fait tirer dessus. Il a essayé de dire aux flics qu’il avait vu quelqu’un portant une veste de treillis verte sortir d’une voiture et tirer sur le flic, et que Mumia est arrivé après coup sur les lieux. Ils n’ont pas voulu l’écouter. Ils l’ont menacé, ont fait pression sur lui et ont falsifié son témoignage. Il a quitté la ville, et il n’était pas présent au procès de 1982. Nous avons fait témoigner Singletary à l’audience post-condamnation (PCRA) de Mumia en 1995.

Nous avons aussi retrouvé Veronica Jones, et elle a témoigné devant le tribunal l’année suivante. C’était une prostituée qui avait témoigné au procès de 1982 qu’elle était sur place, mais qu’elle n’avait pas bien vu ce qui s’était passé. Cela contredisait son témoignage initial, où elle affirmait avoir vu le tireur s’enfuir en courant. Quand elle a témoigné en 1996, elle a reconnu avoir menti lors du procès. Elle a dit que son témoignage originel était véridique, qu’elle avait vu le tireur s’enfuir, mais que les flics l’avaient forcée à changer sa version en la menaçant de l’envoyer en prison pour longtemps pour une accusation de vol, et en lui disant qu’elle serait séparée de ses jeunes enfants. En 1996, pendant qu’elle témoignait, l’accusation l’a fait arrêter en plein tribunal, en utilisant un mandat d’arrêt délivré deux ans plus tôt par un juge du New Jersey pour une affaire de vol à la tire.

Et ensuite il y a eu une autre audience de PCRA en 1997, avec une autre ex-prostituée, Pamela Jenkins, qui avait une liaison avec un flic qui a été inculpé et condamné pour faits de corruption tombant sous le coup des lois fédérales. Jenkins a témoigné que plusieurs policiers savaient que Mumia n’était pas l’auteur des coups de feu. Elle a témoigné que Cynthia White, une autre prostituée qui était le témoin-clé de l’accusation, avait menti quand elle avait déclaré avoir vu Mumia tirer sur Faulkner. Elle avait menti parce que les flics l’avaient menacée, et qu’elle avait peur d’eux.

Ce sont quelques-unes des choses qui sont arrivées dans la première période, présentées devant feu le juge Sabo, le juge raciste qui dirigeait le tribunal sans même faire semblant de traiter l’accusé équitablement. En 1982, avant le procès de Mumia, le juge Sabo avait déclaré en présence d’une sténographe du tribunal et d’un autre juge « Je vais les aider à faire frire le n---e. » C’était ça le juge Sabo.

L’importance des aveux de Beverly

Je veux dire quelques mots sur Arnold Beverly, qui a reconnu avoir tué Faulkner. Arnold Beverly était un homme de main de la pègre. Il avait été engagé, d’après ses dires, par la pègre et les flics – par l’intermédiaire d’un agent de liaison avec la police – pour abattre Faulkner cette nuit de décembre 1981. Il avait entendu dire – et c’est tout ce qu’on lui avait dit – que Faulkner devenait gênant pour les flics et la pègre. La corruption était partout dans le Centre-Ville. Les flics touchaient de l’argent des night-clubs, des tripots, de la prostitution.

Nous avons appris plus tard qu’à l’époque où Faulkner a été tué, trois enquêtes fédérales sur la corruption des flics étaient en cours, et que ces enquêtes devaient révéler que les flics et la pègre s’entendaient comme larrons en foire. Nous avons une déclaration sous serment d’un témoin qui a témoigné dans plusieurs affaires diligentées par des procureurs fédéraux que des flics lui avaient dit qu’ils craignaient que le FBI ait un informateur dans la police. Nous croyons que cet informateur était Faulkner, que la mort de Faulkner était le résultat d’un contrat, et que Beverly était l’un des exécutants engagés pour cela. Quand Mumia est arrivé sur les lieux, tout à fait par hasard, les flics présents sur place savaient exactement qui il était. Certains des flics impliqués dans cette affaire de corruption étaient les mêmes flics qui avaient précédemment attaqué les Black Panthers, et qui avaient attaqué MOVE.

Le policier le plus gradé sur les lieux le 9 décembre 1981 était l’inspecteur Alfonzo Giordano. Il se trouve que c’était aussi le bras droit de Frank Rizzo, ancien chef de la police et maire de Philadelphie. Il se trouve aussi qu’il avait été chef de la brigade de surveillance, l’équipe SWAT [équivalent du GIGN] de Philadelphie qui s’était attaquée aux Panthers en 1969 et 1970. C’était aussi le flic qui avait commandé la mise en place de barricades autour de l’immeuble de MOVE à Powelton Village en 1977-1978.

Quand les flics ont vu Mumia sur les lieux en décembre 1981, ils savaient tous que c’était celui qui, à l’âge de 16 ans, avait été le porte-parole des Panthers en 1970, celui qui avait dénoncé l’assassinat des Panthers par le FBI. Moins de dix ans plus tard, Mumia était devenu journaliste et avait dénoncé les mensonges des flics et de la municipalité contre l’organisation MOVE. Mumia avait couvert le procès des 9 de MOVE, condamnés injustement pour le meurtre d’un flic pendant le siège de Powelton Village, quand en fait ce flic avait été tué par une balle perdue tirée par la police. Les membres de MOVE avaient été condamnés à des peines de 30 à 100 ans de prison. Ce procès avait eu lieu en août 1981. Faulkner se fait tirer dessus, Mumia se fait tirer dessus, presque tuer, en décembre 1981. La police savait exactement qui était Mumia, et ils étaient vraiment contents de mettre la main sur lui.

Bon, on a dit beaucoup de choses sur Arnold Beverly, qu’il recherchait l’argent et la célébrité, et qu’il a donné beaucoup de versions différentes. Il y a une déclaration sous serment de Beverly dans la brochure du PDC La lutte pour libérer Mumia Abu-Jamal [reproduite en français par le Comité de défense sociale, organisation sœur du PDC – voir la publicité ci-dessous], que vous devez lire. J’ai parlé pour la première fois avec Arnold Beverly en 1989. Il m’a dit beaucoup de choses sur lesquelles il n’a jamais varié, sauf sur un point. En 1989, il n’avait pas reconnu avoir tué Faulkner. En 1999 il l’a reconnu. L’essentiel de ses déclarations, y compris le nom des flics impliqués dans le montage de l’opération, reste identique. Arnold Beverly a avoué, et est prêt à témoigner pour Mumia, non pas parce que c’est un brave type altruiste, non pas pour l’argent mais parce que les flics ont essayé aussi de tuer Beverly cette nuit-là, parce qu’ils voulaient que ça ressemble à une simple fusillade dans la rue entre différents groupes de Noirs, et que Faulkner a été tué au milieu de tout ça. Et Beverly s’est fait tirer dessus cette nuit-là.

Je voudrais aussi dire quelque chose sur la rumeur selon laquelle Mumia ne voudrait rien avoir à faire du témoignage de Beverly. Mumia sait ce que le PDC fait à son sujet, comme c’est le cas depuis 20 ans que nous travaillons avec lui. Ca ne veut pas dire que Mumia est d’accord avec tout ce que dit le PDC, mais il n’y a rien que nous ayons fait le concernant dont il ne soit pas au courant, sur quoi il n’aurait pas eu la possibilité de dire oui ou non. Il est au courant des encarts publicitaires passés dans les journaux à l’initiative du PDC sous le titre « Mumia Abu-Jamal est innocent ! », qui ont été publiés pour protester contre la machination d’Etat et citer les preuves de son innocence, y compris les aveux d’Arnold Beverly. Mumia a approuvé tout le travail que nous faisons.

Pourquoi tout ce tintamarre autour de ça ? Je dis clairement que le témoignage de Beverly n’a été mis sur le devant de la scène qu’en 2001. Son témoignage donnait un tableau complet de ce qui s’était passé. Les éléments extrêmement contradictoires présentés par l’accusation lors du procès de Mumia sont explicables seulement à partir des informations fournies par Beverly. C’est-à-dire le nombre de tireurs, où ils se trouvaient. C’est-à-dire le type d’arme utilisée.

Ce qui est très important, c’est que le témoignage de Beverly a quelque chose à voir avec la manière dont Mumia s’est fait tirer dessus – non pas par Faulkner, mais par un autre flic. Et il y avait quelque chose qui nous avait toujours posé problème. Nous avions examiné tout le dossier, et il y avait toutes ces mentions dans les rapports de police, du fait que le tireur portait une veste de treillis verte. Quelqu’un affirmait que le type dans la voiture qui avait été stoppée sur les lieux par Faulkner portait une veste de treillis verte, et quelqu’un d’autre affirmait que Mumia portait une veste de treillis verte. Six ou sept personnes affirmaient qu’il y avait sur les lieux de la fusillade quelqu’un avec une veste de treillis verte.

J’ai examiné les éléments qui sont en possession de l’accusation, et j’ai parlé à Mumia et à son frère, Billy Cook. Et je peux vous dire que Mumia ne portait pas cette nuit-là de veste de treillis verte. Il portait une espèce de blouson de ski rouge, avec de grandes bandes bleues sur le devant. Billy Cook portait une veste bleue, style Nehru, avec des boutons en cuivre. Et Faulkner ne portait pas de veste de treillis verte ; il portait un uniforme de policier. Singletary affirmait que le tireur portait une veste de treillis verte. Deux flics ont affirmé qu’il y avait une veste de treillis verte sur les lieux, et l’un d’eux que le tireur avait une veste de treillis verte. Arnold Beverly a affirmé qu’il portait une veste de treillis verte.

Machination et dissimulation

En plus, les preuves balistiques ne collent pas avec la version de l’accusation. Aussi les flics et l’accusation ont-ils inventé des aveux que Mumia aurait soi-disant faits. Et sur cette question des aveux, je voudrais revenir en arrière. Giordano, qui était sur place quand Mumia a été arrêté, a inventé un témoin à qui il s’avère que des promesses ont été faites, et qui n’était pas à l’endroit où l’accusation dit qu’il était. Giordano a aussi inventé l’histoire selon laquelle Mumia – après s’être fait tirer dessus, tabasser, jeter dans un fourgon de police – aurait passé des aveux, et que son arme aurait simplement été laissée sur les lieux.

Giordano n’a jamais témoigné lors du procès. En fait, pendant le procès de Mumia il a été relevé du service actif et affecté à un travail de bureau. Il a démissionné de la police le lendemain de l’annonce de la condamnation à mort. Ce n’est qu’en 1986 qu’il a été inculpé de corruption et d’évasion fiscale, accusations pour lesquelles il a plaidé coupable, sur la base qu’il avait touché des dizaines de milliers de dollars de pots-de-vin durant la période 1979-1980. 1981 ne figure pas là-dedans. Mais nous avons un témoin qui affirme que Giordano faisait cette année-là l’objet d’une enquête fédérale.

Rien dans le dossier de l’accusation ne résiste à l’examen. Vous regardez les expertises balistiques, les témoins et ce qu’ils ont affirmé avoir vu, et ce que l’accusation a affirmé, et ça ne tient pas debout. Il y a preuve sur preuve, encore et encore, que Mumia est innocent, que sa condamnation était une machination de la police et de l’accusation, que le FBI sait parfaitement qui était impliqué dans cette affaire. Ils savent que Faulkner soit était un informateur, soit était impliqué d’une autre manière. Et ils savent que des flics comme Giordano, qui étaient impliqués dans l’accusation contre Mumia, faisaient l’objet d’une enquête. Rien de tout ceci n’a transpiré pendant le procès de Mumia. Et le tribunal a refusé de communiquer aux avocats de la défense de Mumia la moindre information pendant les audiences d’appel PCRA, de 1995 à 1998.

Ce que fait le témoignage de Beverly, c’est de rendre impossible à quiconque de prétendre que le cas de Mumia est le fait d’un seul flic véreux ou d’un seul procureur à l’honnêteté douteuse et d’un seul juge raciste. Le cas de Mumia démontre la nature de l’Etat capitaliste, la nature des tribunaux, des flics et des procureurs.

Il y a une semaine, j’ai reçu un appel de Frank Serpico. On se rappelle peut-être de lui comme le flic de New York qui a craché le morceau à propos de la corruption dans la police en 1971. Ce qu’il m’a dit sur le Fraternal Order of Police (FOP) est très intéressant. Il a dit : je connais ces types. Je sais que le fait que le Fraternal Order of Police prend pour cible toute personne qui a pris la défense de Mumia prouve qu’ils cherchent à couvrir quelque chose, que c’est la preuve que Mumia est innocent, et cela prouve la corruption de ces flics. Parce que le FOP a une histoire de protection des flics partout et tout le temps.

Bon, je ne suis pas d’accord avec Serpico qu’il serait possible d’avoir une police sans flics corrompus. Je veux que ce soit clair. Mais c’est un homme qui a passé sa vie à essayer de trouver de l’honnêteté dans la police, et qui a risqué sa vie pour faire ça. Donc on doit respecter ça, dans le cadre de sa propre logique. Ces forces de police sont très puissantes, elles sont aidées, encouragées et soutenues par les Démocrates et les Républicains. Et, rangés derrière, il y a les pseudo-socialistes qui colportent le mensonge que l’Etat capitaliste peut être réformé.

Je veux finir avec le point suivant. Nous avons devant nous une bataille énorme, vraiment énorme. Ça ne nous aidera pas de penser que peut-être parce que la Cour d’appel pourrait examiner un recours engagé en faveur de Mumia, et rendra sa décision au cours des prochains mois, ce serait là la solution pour Mumia. Chaque étape du cas de Mumia a montré que les tribunaux sont déterminés à faire exécuter Mumia, ou à lui faire passer le reste de sa vie emmuré dans une prison. Il faudra non seulement notre mobilisation, à nous qui sommes ici ce soir, mais des mobilisations de masse, centrées principalement sur la puissance du mouvement ouvrier, avec ses alliés – les jeunes, les chômeurs, etc. – pour montrer que nous ne permettrons pas à l’Etat d’exécuter Mumia ou de l’emmurer en prison pour la vie, pour montrer que nous sommes déterminés à lutter pour la libération immédiate de Mumia. Libération immédiate de Mumia !

 

Le Bolchévik nº 179

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