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Le Bolchévik nº 171 |
mars 2005 |
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Non à l’Union européenne capitaliste et sa « Constitution » !
Le PCF et la LCR réhabilitent Fabius, ex-Premier ministre de Mitterrand
En juin dernier les chefs d’Etat de l’Union européenne (UE) se mettaient d’accord sur le texte d’un projet de « Constitution » européenne. Chirac a annoncé qu’il soumettrait le texte à un référendum le 29 mai, espérant consolider par un plébiscite son autorité racornie par trois années d’attaques sauvages contre les travailleurs et les minorités, et par les rivalités dans l’UMP. Le PS et les Verts, qui comptent revenir au gouvernement en 2007, ont appelé à voter « oui » pour bien montrer leur respectabilité et leur fidélité aux choix de base de la politique étrangère de la bourgeoisie française.
Contre cette nouvelle campagne commune PS-Verts-Chirac nous appelons à voter « non », parce que nous sommes contre l’Europe capitaliste, une alliance autour des principales puissances impérialistes d’Europe pour améliorer leur propre compétitivité face à leurs rivales des USA et du Japon : une telle alliance ne peut se faire que sur le dos de la classe ouvrière multiethnique d’Europe et des peuples asservis par le néocolonialisme.
Notre opposition de principe à l’Europe capitaliste nous distingue de la « gauche » française. Si l’on excepte les chevènementistes bourgeois, certains secteurs ultra-chauvins du PCF et le PT (Parti des travailleurs, lambertiste, connu surtout pour sa « défense de la République » française impérialiste), la plupart des opposants au projet de Constitution jurent leurs grands dieux qu’ils ne sont pas contre l’Europe capitaliste en soi. Le PCF et la LCR, qui font pratiquement campagne commune pour le « non », insistent qu’ils sont pour l’Europe (capitaliste), mais contre l’Europe « néolibérale » de la « Constitution Giscard ». Ces réformistes propagent ainsi le mythe qu’il y aurait un « bon » capitalisme européen « social et démocratique », pour lequel il faudrait lutter, et un « mauvais » capitalisme « néolibéral ».
Lutte ouvrière (LO) aussi soutient l’Europe capitaliste depuis des années. Elle s’était abstenue lors du référendum sur le traité de Maastricht en 1992. Cette fois-ci elle vote « non », mais elle n’arrête pas de louer l’unification capitaliste de l’Europe. Elle vient d’écrire un nouvel article dans Lutte de classe (février) :
« […] l’unification européenne, nous sommes pour. […] Même telle quelle, réalisée sur des bases capitalistes, avec tout ce qui en découle d’injustices et d’insuffisances, l’Union européenne représente un progrès dans un certain nombre de domaines. Rien que la fin des cloisonnements économiques et des douanes, ainsi que la liberté de circulation des personnes à l’échelle d’une partie du continent, représentent un avantage appréciable par rapport aux contrôles, aux barbelés, bien que cette liberté ne soit pas pleinement reconnue aux immigrés qui vivent et travaillent dans l’Union. »
Dans cet article de huit pages, LO fait tout simplement disparaître les rivalités de l’Europe avec les USA et celles des puissances impérialistes européennes entre elles, et dresse un tableau idyllique de l’UE pour couvrir son propre soutien à l’UE impérialiste. « Liberté de circulation » ? Allez dire cela aux Roms qui fuient les pogromes en Roumanie, dans les Balkans ou en Slovaquie (qui fait partie de l’UE) et qui se font partout persécuter par les flics. « Un avantage par rapport aux barbelés » ? On estime à 4 000 le nombre d’immigrés africains qui se sont noyés ces dernières années en tentant de passer le détroit de Gibraltar pour entrer dans cette forteresse raciste qu’est l’Union européenne, et les ministres de celle-ci discutent ouvertement de mettre en place des camps de concentration financés par l’UE en Libye (ou ailleurs, mais loin des chastes regards de LO). Un ouvrier marocain, s’il est parvenu à se faire régulariser en Espagne, a le droit de « circuler » en France, tant qu’il ne s’arrête jamais car il n’a aucun droit de résidence ici.
Pour notre part nous considérons l’Union européenne comme un consortium impérialiste réactionnaire, et nous rappelons les mots prophétiques de Lénine en 1915 :
« Certes, des ententes provisoires sont possibles entre capitalistes et entre puissances. En ce sens, les Etats-Unis d’Europe sont également possibles, comme une entente des capitalistes européens… dans quel but ? Dans le seul but d’étouffer en commun le socialisme en Europe, de protéger en commun les colonies accaparées contre le Japon et l’Amérique […]. »
L’Union européenne, d’une alliance antisoviétique à un consortium impérialiste
L’Union européenne a commencé à se constituer à partir des années 1950 de la volonté des impérialistes d’Europe de l’Ouest, sous la direction des USA, de consolider leur alliance contre l’Union soviétique grâce à une meilleure cohésion économique. L’Union soviétique, en dépit de sa dégénérescence suite à l’usurpation du pouvoir politique à partir de 1924 par une caste parasitaire bureaucratique dirigée par Staline, demeurait un Etat ouvrier basé sur l’expropriation des capitalistes et la collectivisation des moyens de production à l’issue de la Révolution d’octobre 1917. C’est pourquoi nous, trotskystes, défendions l’Union soviétique, et c’est pourquoi les impérialistes voulaient la détruire afin de récupérer un accès illimité pour leurs capitaux à toute l’Europe de l’Est.
De notre défense de l’Union soviétique découlait notre opposition de principe à l’alliance militaire contre l’URSS qu’était l’OTAN, et à son corollaire économique qu’était la Communauté économique européenne. Avec la destruction contre-révolutionnaire de l’Union soviétique en 1991-1992 le caractère de l’Union européenne a changé. La France et l’Allemagne, qui sont deux puissances impérialistes séparées avec deux bourgeoisies nationales distinctes et rivales, essaient de se coordonner davantage dans le seul but de faire avancer leurs propres intérêts respectifs, et manœuvrent avec la Russie capitaliste (entre autres). Evidemment l’Allemagne, plus puissante que la France, est le partenaire dominant dans la relation. Déjà un mois après la chute du Mur de Berlin, en décembre 1989, Mitterrand négociait avec le chancelier allemand Kohl un approfondissement des relations économiques entre l’Allemagne et la France, les deux principales puissances d’Europe de l’Ouest, en passant un accord de principe pour la création d’une monnaie commune, qui était censée devenir une machine de guerre monétaire contre l’hégémonie planétaire du dollar. C’est devenu l’euro.
Mais cette alliance évolue de façon contradictoire, sous la pression des impérialistes américains dont l’économie est nettement plus dynamique et la puissance militaire incomparablement plus grande ; les USA, avec l’aide active de la Grande-Bretagne, s’emploient à freiner la constitution d’un pôle impérialiste rival, et le dollar continue à être la devise internationale de référence. De plus l’Union européenne est minée de l’intérieur par les rivalités entre les différentes puissances qui la composent, y compris la France et l’Allemagne, comme on peut le voir sur toute une série de dossiers industriels : Aventis, un « modèle » de compagnie franco-allemande, a été croqué par le français Sanofi-Synthélabo, pendant qu’ Alstom lutte désespérément pour ne pas se faire absorber par l’allemand Siemens. Y compris les « success story » de l’Europe, comme Airbus qui tient maintenant la dragée haute à l’américain Boeing, ne sont pas exemptes de frictions : le lancement de l’A 380 n’a pu se faire qu’après d’interminables tractations franco-allemandes pour répartir les charges de travail (et les profits) entre Toulouse et Hambourg.
Le projet de « Constitution » européenne n’en est pas une, car il ne s’agit pas là de créer un Etat capitaliste européen même fédéral. C’est un traité entre Etats qui concède certains abandons de souveraineté dans le but de définir les règles du jeu de la concurrence entre les différentes classes capitalistes nationales d’Europe, accroître leur compétitivité contre les USA et leurs autres rivaux, et renforcer les attaques contre les travailleurs d’Europe, et notamment les immigrés. Quand Chirac ou Schröder, le Chancelier allemand, parlent d’un monde multipolaire, ils disent simplement qu’ils veulent conjuguer leurs forces et enserrer leurs propres rivalités afin de pouvoir mieux affronter leurs rivaux communs plus puissants, les Etats-Unis et le Japon.
Il n’y a rien, dans une telle alliance entre certains impérialistes contre d’autres, que les travailleurs puissent soutenir, rien qui puisse protéger leurs acquis ! Même avant le traité de Maastricht toute l’histoire de l’Union européenne montre que la « compétitivité européenne » s’améliore en prenant aux travailleurs pour donner aux patrons et ainsi renforcer ces derniers dans leur lutte contre leurs concurrents américains et japonais. Quand les réformistes veulent faire croire que l’intérêt des travailleurs se trouve dans une Europe forte, « sociale et démocratique », c’est une fois de plus lier la classe ouvrière à sa propre bourgeoisie : c’est faire croire que les impérialistes d’Europe seraient moins impitoyables que leurs rivaux américains ou japonais. Le PCF appelait il y a 20 ans à « produire français », maintenant il appelle à une « Europe sociale », mais toujours il lie les travailleurs à leur propre classe exploiteuse – et renforce ainsi cette dernière. C’est ce que les marxistes appellent la collaboration de classes. Les prolétaires de tous les pays doivent au contraire s’unir contre les bourgeoisies de tous les pays.
Les tentatives de création d’un pôle impérialiste en Europe, concurrent des USA, s’accompagnent d’efforts de réarmement : discussions pour constituer des trusts européens intégrés de l’armement, tentatives de s’affranchir des systèmes de renseignements américains en mettant sur pied un réseau de satellites pouvant avoir un usage militaire (Galileo), unités militaires européennes communes qui font dès maintenant la police dans les Balkans, etc. Il y a une haine et une crainte justifiées du militarisme américain parmi les travailleurs, mais si l’opposition au militarisme américain ne va pas dans le sens de l’internationalisme prolétarien, elle sera inévitablement détournée vers le renforcement de la puissance militaire de l’Etat capitaliste ici. Effectivement le PCF, loin de s’opposer à ce réarmement, se préoccupe du fait que ces moyens militaires soient assujettis aux USA via l’OTAN, au lieu d’être indépendants ! Et « le petit facteur » Besancenot de la LCR en rajoute, pleurnichant dans une déclaration à l’AFP le 9 février que la « future défense européenne se fera dans le cadre de l’OTAN, c’est-à-dire à la botte de George Bush junior ». L’antiaméricanisme de la LCR est un obstacle à l’internationalisme prolétarien anti-impérialiste.
Pourquoi les marxistes internationalistes s’opposent à l’élargissement de l’UE
LO a remarqué à juste titre qu’avec l’élargissement à 25 coexistent maintenant dans l’UE non seulement des pays impérialistes et des pays intermédiaires, mais aussi des pays misérablement pauvres. Ce sont des pays issus de la contre-révolution capitaliste qui a ravagé les économies d’Europe de l’Est, et les a ramenées à un statut semi-colonial sous la domination des capitaux notamment allemands, autrichiens et français, dont la pénétration est grandement facilitée par l’élargissement de l’UE. Et pourtant LO soutient cet élargissement ! Comme sa propre bourgeoisie. Comme sa propre bourgeoisie, LO avait soutenu la réunification capitaliste de l’Allemagne il y a 15 ans et plus généralement la contre-révolution dans tout l’ex-bloc soviétique, déclarant par exemple dans Lutte de classe (décembre 1989) : « même si cette réunification [de l’Allemagne] se fait entièrement sous l’égide du capitalisme, les révolutionnaires communistes n’ont aucune raison d’y être opposés ».
En ce qui concerne l’élargissement de l’UE il est utile de revoir la création au début des années 1990 de l’Alena, l’union économique entre les USA, le Canada et le Mexique. Nos camarades américains, canadiens et mexicains avaient alors publié une déclaration commune contre l’Alena (voir Workers Vanguard n° 530, 5 juillet 1991). Appelant à l’unité des travailleurs américains, canadiens et mexicains dans une lutte de classe, cette déclaration disait :
« Globalement c’est l’économie américaine, la plus forte, qui aurait le dessus. De plus les capitalistes américains veulent utiliser l’Alena pour vider de tout contenu les réglementations du travail et celles relatives à l’environnement des deux côtés de la frontière. L’impérialisme yankee veut transformer le Mexique en une gigantesque maquiladora, ou zone franche de libre commerce – “libérée” des syndicats, et “libérée” pour le capital. Loin de “libérer” le commerce international, le pacte a pour objectif de créer une réserve de chasse privée pour la bourgeoisie impérialiste américaine, ses partenaires de deuxième plan canadiens et leurs laquais dans la bourgeoisie mexicaine. »
C’est exactement ce qui s’est passé. En réaction contre la dévastation que cet accord annonçait pour eux, les paysans mexicains du Chiapas se sont soulevés le 1er janvier 1994, le jour de l’entrée en vigueur du traité. A l’époque toute la gauche française, et notamment la LCR, se solidarisait avec le soulèvement zapatiste contre l’Alena.
Et maintenant on voit ces mêmes militants, qui cyniquement à leurs heures se proclament encore « zapatistes », exprimer leur satisfaction à l’entrée de la Pologne dans l’UE et revendiquer celle de la Turquie ! L’Alena n’est pas l’UE mais l’entrée de la Pologne, et demain de la Roumanie voire de la Turquie dans l’UE, aggrave l’oppression des travailleurs et des paysans de ces pays. Comme le soulignent nos camarades allemands (Spartakist, automne 2004) :
« Lors des négociations sur l’entrée dans l’UE les impérialistes européens ont dressé une série de critères d’entrée qui représentent un programme d’attaques sociales brutales. En Pologne par exemple le secteur minier a été “assaini”, c’est-à-dire que les mineurs ont été licenciés en masse et les puits fermés. Les indemnités de chômage sont si faibles qu’on ne peut pas en vivre. Aujourd’hui on trouve dans la région minière historique de Jelenia Góra (où le taux de chômage est supérieur à 40 %) de nombreuses mines dans la forêt, qui ont été créées par des mineurs licenciés qui creusent avec des bêches pour trouver du charbon. […] C’est le résultat de la contre-révolution – dirigée en Pologne par Solidarność. »
Mais c’est la Turquie qui provoque surtout les protestations hystériques. Les Le Pen, de Villiers, Sarkozy, Fabius, sont tétanisés par l’idée que 70 millions de musulmans turcs et kurdes puissent entrer dans l’UE ; en fait c’est la population d’origine musulmane et maghrébine en France qui est aussi visée par cette campagne raciste puante. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut être pour l’entrée de la Turquie dans l’UE, comme le prétendent LO et la LCR qui du coup se retrouvent sur cette question en bloc… avec Chirac et le PCF. Alain Bocquet, le chef du groupe PCF à l’Assemblée, recopiant les arguments de Chirac, a très bien exprimé les raisons pour lesquelles le PC chauvin est pour l’entrée de la Turquie :
« Dans l’optique de l’Europe voulue par les communistes, avancer dans cette voie est préférable à une Turquie isolée aux portes de l’Europe. Au risque, sinon, de faire de la Turquie la proie de plusieurs dérives possibles. Une première serait la montée d’un islamisme intégriste – je rappelle à cet égard que la Turquie, société à dominante musulmane, est sur le plan des institutions un Etat laïc ; une seconde, l’affirmation d’un militarisme exacerbé – l’armée est un pilier important de la société turque, dans laquelle elle joue un rôle d’ascenseur social ; et la troisième, le risque d’une dérive atlantiste, les Etats-Unis considérant toujours le maintien de la Turquie dans le giron de l’OTAN comme un enjeu stratégique de premier plan. »
– l’Humanité, 9 février
Quand des militants de gauche français répandent l’idée que l’Union européenne apporterait la liberté aux Kurdes et la démocratie aux ouvriers turcs, ils montrent simplement leurs profondes illusions dans le caractère soi-disant progressiste de leur propre bourgeoisie. C’est ce genre d’illusions qui désarme la classe ouvrière et l’empêche de mener une lutte de classe révolutionnaire. La déclaration de Bocquet va au cœur de la question sur l’entrée de la Turquie : il s’agit de contester la suprématie américaine dans la région. Quand la gauche se proclame pro-européenne et internationaliste même en votant non au projet de « Constitution », en réalité elle sert de couverture au chauvinisme français. Elle a simplement une autre approche de quelle façon renforcer sa propre bourgeoisie en espérant en obtenir quelques miettes pour la classe ouvrière française.
Il semble que beaucoup de travailleurs et de paysans kurdes s’imaginent que l’Union européenne leur apporterait la fin d’une oppression nationale séculaire. Rien n’est plus faux. Non seulement l’Union européenne n’acceptera pas la partition de la Turquie, de la Syrie, de l’Irak et de l’Iran pour unifier une république kurde indépendante, mais même dans les pays les plus avancés de l’Union européenne la question nationale n’a nulle part été résolue : les Irlandais catholiques sont opprimés en Irlande du Nord, les Basques en Espagne et en France, sans compter les Corses et l’oppression coloniale en Guadeloupe et ailleurs. Quant à la Grèce, membre de l’UE depuis presque 25 ans, elle continue à opprimer les Turcs, les Slavo-Macédoniens, les Albanais, les Roms et une multitude d’autres minorités.
Les « délocalisations » et la lutte contre le racisme et le chauvinisme
Aujourd’hui beaucoup de travailleurs se sentent menacés par les fermetures d’usines décidées par les entreprises qui cherchent à les délocaliser en Europe de l’Est, en Turquie, vers l’Etat ouvrier déformé chinois ou ailleurs. A partir du moment où les bureaucrates syndicaux acceptent la perspective capitaliste, il ne leur reste qu’à acquiescer à la nécessité que leurs propres entreprises nationales accroissent leur compétitivité sur le marché mondial, et donc les bureaucrates multiplient les accords de démantèlement des acquis arrachés dans le passé en termes de salaires, d’horaires et de conditions de travail.
Les capitalistes cherchent à détourner la colère des travailleurs vers leurs frères de classe d’autres nationalités, à l’étranger et dans leur propre pays. C’est pourquoi nous insistons que la lutte contre ces attaques de la bourgeoisie, y compris les fermetures d’usines au nom de la « délocalisation », ne peut se faire que si on lutte férocement contre la terreur raciste et le chauvinisme. Pleins droits de citoyenneté pour tous ceux qui sont dans le pays ! Nos camarades allemands du Spartakist-Arbeiterpartei Deutschlands font remarquer (Spartakist n° 157, hiver 2004-2005) :
« En résultat de la contre-révolution capitaliste en RDA et en Europe de l’Est la bourgeoisie allemande dispose aujourd’hui d’un vaste réservoir de travailleurs qualifiés au chômage, et elle tente d’exporter le travail simple dans des pays où le taux de profit est significativement plus élevé. Les travailleurs turcs et kurdes demeurent une composante stratégiquement importante de la classe ouvrière en Allemagne, mais les dirigeants racistes de l’Allemagne ont de moins en moins besoin économiquement d’une grande partie de la population turque et kurde, notamment de la deuxième et troisième génération, pour laquelle il n’y a pas de travail. Ils sont considérés par la classe dirigeante avec un mépris raciste mais aussi avec angoisse, parce qu’ils représentent une matière sociale explosive. »
Et nos camarades allemands rapportaient lors de la puissante grève d’Opel-Bochum dans le bastion industriel de la Ruhr en octobre dernier (ibid.) :
« Il y avait aussi beaucoup de discussions sur l’usine Opel de Gliwice en Pologne. Nous n’avons pas entendu de chauvinisme antipolonais ouvert, mais il y avait quand même une atmosphère : “On ne peut pas être de la partie avec les salaires de là-bas”. Et pourquoi devraient-ils ? Les travailleurs en Allemagne doivent aider les travailleurs de Pologne à lutter pour des salaires et des conditions de travail décents, contre la soif de profit capitaliste qui s’est totalement déchaînée avec la contre-révolution. Pour cela nous avons besoin d’un parti révolutionnaire qui se base sur un programme de lutte de classe internationaliste. En dernier ressort, seule une économie planifiée sous le contrôle de la classe ouvrière peut éliminer les contrastes économiques et sociaux criants entre les différents pays. »
C’est dans cette perspective que s’inscrit notre mot d’ordre d’Etats-Unis socialistes d’Europe. Ce n’est qu’en renversant les bourgeoisies d’Europe par des révolutions ouvrières que l’on pourra avancer vers une société socialiste dépassant le cadre des Etats-nations.
La LCR et le PCF réhabilitent Fabius
La campagne commune PCF-LCR pour le « non » est une contribution de la LCR à redorer le blason de la social-démocratie française, bien écorné, tout particulièrement pour ce qui est du PCF, par les cinq ans de sale boulot qu’il a fait dans le gouvernement Jospin. Ils font le tour de force de réhabiliter Fabius, partisan du « non » dans le PS, mais qui a longtemps personnifié le « néolibéralisme » dans le PS grâce à ses attaques féroces contre la classe ouvrière quand il était Premier ministre de Mitterrand dans les années 1980. Lors des législatives de 1986 (qu’il avait perdues contre Chirac), Fabius s’était même vanté que « C’est à nous qu’est revenu de faire le “sale boulot” » (le Bolchévik, supplément au n° 68, 8 décembre 1986) ! « red » (janvier), le journal de jeunesse de la LCR, répand pourtant la fable suivante :
« Cette constitution divise l’ex-gauche plurielle entre, les sociolibéraux qui lui sont favorables et les réformistes [donc Fabius] qui comprennent qu’avec elle, il n’y aura même plus de place pour un bout de politique sociale. La tâche des révolutionnaires c’est donc de pousser plus loin cette contradiction pour amorcer un mouvement de recomposition politique que l’on va tenter de tirer vers la gauche radicale, du côté des révolutionnaires. »
En fait PCF et LCR misent sur un fort taux de « non » pour négocier avec le PS, après le référendum, une meilleure distribution des places dans la prochaine alliance de la « gauche » aux élections de 2007 et pour entrer eux-mêmes dans le gouvernement capitaliste. Un gouvernement Fabius-Buffet qui naîtrait d’une victoire du « non », même avec Krivine de la LCR comme ministre ou plus vraisemblablement sous-secrétaire d’Etat, même avec un membre des JCR au Secrétariat à la Jeunesse et aux Sports (leur camarade Rossetto est déjà ministre capitaliste au Brésil depuis deux ans – voir notre article page 7), un tel gouvernement serait tout aussi férocement anti-ouvrier que ses prédécesseurs, quelles que soient les bonnes intentions ou en tout cas les belles paroles de ces réformistes : il n’y a pas d’autre manière d’administrer le capitalisme que d’attaquer les travailleurs. Ce qu’il faut c’est lutter pour renverser tout le système capitaliste par une révolution ouvrière.
Nous votons « non » à ce référendum, mais surtout nous mettons en garde les travailleurs contre les manœuvres de la LCR et du PCF pour reconstituer une nouvelle « gauche plurielle » de gouvernement. A bas la collaboration de classes ! Rejoignez notre lutte pour un véritable parti communiste internationaliste en France, faisant partie d’une Quatrième Internationale trotskyste reforgée ! |
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