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Supplément à République ouvrière |
Août 2020 |
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Pour le contrôle syndical de l’embauche et des horaires !
Pour la victoire des débardeurs !
10 août 2020 — La convention collective des débardeurs du port de Montréal étant échue depuis décembre 2018, les patrons rapaces de l’Association des employeurs maritimes (AEM) sont passés à l’offensive et ont poussé les 1125 membres de la section locale 375 du SCFP ainsi que la section locale 1657 de l’Association internationale des débardeurs (AID) à déclencher une grève illimitée. C’est la question des horaires qui est au cœur de ce conflit de classe. L’AEM veut porter un coup au syndicat, maintenir la « flexibilité » de sa force de travail et est déterminée à garder les débardeurs enchaînés aux quais 19 jours sur 21, les privant effectivement d’une vie à l’extérieur du travail. Pour essayer d’isoler les débardeurs et de miner leur grève, les capitalistes ont lancé une campagne de salissage sur leurs salaires dans les médias bourgeois, alors que les parasites de l’AEM s’assoient sur des milliards de dollars extorqués par l’exploitation de ces travailleurs. En pleine pandémie de COVID-19, tous les travailleurs sont confrontés aux attaques brutales des capitalistes qui veulent les faire payer pour la crise économique et sanitaire que leur système pourri a créée. Tout le mouvement ouvrier doit appuyer la grève du SCFP 375 et de l’AID 1657 !
Il faut exiger le plein contrôle syndical de l’embauche, avec un système de rotation des heures permettant de répartir équitablement le travail entre toutes les mains disponibles. Un véritable bureau d’embauche syndical mènerait des campagnes pour recruter davantage de travailleurs, particulièrement parmi les femmes et les minorités. Pour pouvoir jouir d’une vie en dehors du travail, il faut exiger une réduction des heures sans perte de salaire, comme une semaine de travail de 30 heures payées comme 40, au plus haut taux horaire syndical. Il faut aussi des garderies gratuites, ouvertes 24 heures sur 24, ce qui touche particulièrement à la condition des femmes travailleuses doublement opprimées.
Mais ces demandes se heurtent forcément aux intérêts des capitalistes, dont les immenses profits sont tirés de l’exploitation toujours croissante de la classe ouvrière. Pour accroître leurs bénéfices, les capitalistes doivent s’attaquer aux syndicats, imposer des augmentations de cadences et des horaires insoutenables, mettant la santé et la sécurité des travailleurs en danger. Les intérêts des patrons et des travailleurs sont tout simplement irréconciliables : les ouvriers doivent se débarrasser une fois pour toutes du système de profits et administrer eux-mêmes la société en fonction des besoins de la population.
L’État : outil répressif des patrons
Les travailleurs ne peuvent certainement pas compter sur la « bonne volonté » des patrons ni sur la négociation de « bonne foi ». Mais il est tout aussi suicidaire de compter sur une intervention de l’État et de ses tribunaux en leur faveur. L’État est l’outil d’oppression de la classe bourgeoise pour maintenir sa domination sur la classe ouvrière. Les fondements de l’État capitaliste canadien sont l’oppression nationale du Québec et la monarchie britannique ; il sert à défendre le système de profits de la bourgeoisie anglophone et de ses larbins canadiens-français. L’État bourgeois, c’est la police, l’armée, les tribunaux et les prisons, un arsenal déployé lors des luttes des travailleurs pour casser les piquets de grève, protéger les scabs et poursuivre les travailleurs en justice. Les débardeurs font déjà face à cet appareil répressif avec le SPVM qui a ouvert une enquête criminelle contre des grévistes, ainsi que le Conseil canadien des relations industrielles qui applique le maintien des « services essentiels » lors des grèves.
Les dirigeants syndicaux colportent tout le temps l’illusion que négocier sous un gouvernement libéral serait plus favorable pour les travailleurs que sous les conservateurs. Cela ne fait qu’enchaîner les travailleurs à leurs ennemis de classe. Peu importe le parti au pouvoir (ce qui vaut aussi bien pour les sociaux-démocrates chauvins du NPD qui voudraient prendre les rênes à Ottawa, ou pour les partis qui se succèdent à Québec), le gouvernement capitaliste n’est toujours qu’un comité exécutif pour la bourgeoisie. Trudeau et sa clique de libéraux sont des experts, au même titre que les conservateurs, dans le cassage de grèves et de syndicats. C’est lui qui a cassé la grève du syndicat des travailleurs de Postes Canada en 2018 avec une loi spéciale. Placer ses espoirs dans les laquais des boss au parlement est une recette pour la défaite.
Plutôt que de chercher des appuis chez les politiciens bourgeois, les travailleurs doivent se tourner vers leurs véritables alliés : leurs frères et soeurs de classe. Le syndicat doit chercher à mobiliser les camionneurs et les ouvriers des chemins de fer afin qu’ils refusent de transporter les marchandises du port. Il faut aussi des lignes de piquetage fermes que personne n’ose traverser afin que rien n’entre ou ne sorte du port. Ce n’est pas en cherchant à être de « bons partenaires » de l’AEM pour la « rentabilité » du port de Montréal que les travailleurs obtiendront quoi que ce soit. C’est dans la solidarité internationale que réside toute la force potentielle des débardeurs. Comme les patrons de l’AEM ont déjà mis le port en lockout technique en redirigeant des navires vers les ports de New York, Halifax et Saint-Jean, il est urgent de mobiliser les syndicats là-bas pour qu’ils refusent de décharger les bateaux détournés.
Les travailleurs ont besoin d’une direction guidée par la politique de la lutte de classe, c’est-à-dire sans aucune illusion dans la possibilité de concilier les intérêts des travailleurs et ceux des patrons. C’est précisément une telle direction qui a fait la différence lors de la grande grève des débardeurs de la côte ouest des États-Unis en 1934. Cette grève leur a permis d’obtenir le bureau d’embauche syndical dont disposent encore les débardeurs de l’International Longshore and Warehouse Union (bien que cet acquis ait été érodé depuis par les attaques patronales et la collaboration des bureaucrates syndicaux). Comme nous l’écrivions dans l’article « Hier et aujourd’hui » :
« …la combativité des ouvriers n’était pas freinée par des dirigeants qui prêchaient l’idée mensongère qu’un “partenariat” entre travail et capital était possible. Au contraire, la force et la solidarité de masse des travailleurs étaient organisées et dirigées politiquement par des dirigeants qui rejetaient l’idée que les patrons seraient “raisonnables” ou leur État “neutre”. »
— Le Bolchévik no 212, juin 2015
Pour une république ouvrière !
La classe dominante cherche constamment à diviser les travailleurs en propageant son poison raciste et sexiste pour renforcer sa domination. En plus de lutter pour de meilleures conditions de travail, il est crucial pour l’unité du mouvement ouvrier qu’il soit mobilisé en défense de tous les opprimés, notamment la minorité musulmane attaquée par la loi 21 raciste. Avec cette loi, les dirigeants veulent chasser les femmes voilées des garderies et des écoles ainsi que monter les travailleurs contre les musulmans plutôt que contre leurs exploiteurs : l’AEM et tous les autres capitalistes.
Pour lier les luttes des travailleurs avec celles de tous les opprimés, l’outil nécessaire est un parti ouvrier révolutionnaire et multiethnique luttant pour une république ouvrière du Québec. C’est seulement lorsque les travailleurs auront chassé les capitalistes du pouvoir par la révolution socialiste et seront aux commandes de leur propre État qu’ils pourront utiliser toutes les ressources de la société pour assurer leurs intérêts et satisfaire les besoins collectifs, tout en éliminant le surtravail des uns et le chômage des autres. Victoire aux débardeurs ! Pour l’indépendance du Québec et le socialisme !
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