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	Supplément	Septembre 2008

Jeune abattu par les policiers racistes à Montréal

Défense des immigrés et des minorités! Pour l'indépendance du Québec!

L’article suivant est traduit de Spartacist Canada no 158, automne 2008.

Le 9 août dernier des flics ont tué Fredy Villanueva, 18 ans, immigré du Honduras, et ont blessé deux autres jeunes. Cela a provoqué une explosion de rage à Montréal-Nord. La veille, Fredy, son frère Dany et quelques amis jouaient aux dés dans un parc, lorsque deux flics étaient venus les harceler. Lorsqu’ils ont saisi Dany Villanueva, Fredy s’est écrié « Lâchez mon frère » et les policiers l’ont tué. Ils ont aussi tiré sur Jeffrey Sagor Metelus et Denis Meas, le meilleur ami de Fredy.

Le lendemain plus d’une centaine de personnes en colère ont manifesté dans le quartier en scandant « Policiers assassins! » Et le soir, la rage s’est déchaînée, des voitures ont été incendiées et des vitrines de magasins brisées. Une armée de 500 flics est alors descendue, en arrêtant au moins six personnes. Deux nuits plus tard, des jeunes à Rivière-des-Prairies, un quartier voisin, ont jeté des pierres sur des voitures de police, ce qui a conduit à l’arrestation de 12 autres personnes. Levée de toutes les inculpations !

Montréal-Nord est un des quartiers les plus pauvres de Montréal, avec beaucoup d’immigrés et de jeunes de la deuxième génération, venant en particulier d’Haïti et d’Amérique latine. Le taux de chômage y est le plus élevé de la ville, surtout parmi les jeunes noirs ou latino-américains, qui sont constamment victimes de « profilage racial » de la part des flics. Les coups de feu de la police et la répression, auxquels s’ajoute une virulente campagne des médias contre les « gangs » de jeunes immigrés, montrent ce qu’est en réalité le débat sur les « accommodements raisonnables » au Québec: une manipulation cynique qui se sert de l’oppression nationale du Québec pour la transformer en campagne raciste afin de remettre les minorités ethniques « à leur place ».

Le racisme anti-immigrés et la violence policière s’intensifient dans tout le Canada. Le gouvernement conservateur fédéral, tout en demandant hypocritement «  pardon » pour les mauvais traitements subis dans le passé par les immigrés de Chine, d’Inde et d’ailleurs, a renforcé les lois anti-immigrés pour pouvoir empêcher d’entrer ou pour expulser les immigrés pauvres. On se sert de la « guerre contre le terrorisme » pour diaboliser des communautés entières — les musulmans, les Tamouls, les Sikhs — et renforcer l’appareil de répression de l’Etat capitaliste. En Colombie britannique, les flics sont maintenant bien connus pour leurs attaques mortelles au taser, y compris contre un immigré polonais, Robert Dziekanski, à l’aéroport de Vancouver à l’automne dernier. Des jeunes noirs et des jeunes philippins ont été tués à Toronto. L’an dernier le ministère de la sécurité publique du Québec a admis que la police avait tué 53 personnes dans la province depuis le début de 2005 — une moyenne de 20 par an.

Il faut mobiliser le puissance de la classe ouvrière !

Trois cent personnes sont venues aux funérailles de Fredy Villanueva le 14 août. Un des participants a déclaré à la presse que ce qu’on ressentait à Montréal-Nord c’était « de la rage, beaucoup de rage…. Toute la communauté est préoccupée. » Cherchant à contenir la colère, plusieurs leaders de la communauté ont réclamé une enquête publique sur ce meurtre. Mais les gouvernants ont depuis longtemps recours à ces simulacres d’enquête ainsi qu’aux comités de surveillance « indépendants » et autres instances de ce genre pour canaliser la colère. Cela ne mettra en aucune manière fin aux violences policières et n’améliorera en rien la réalité quotidienne raciste de la société capitaliste.

Québec Solidaire (QS) a publié le 11 août une déclaration commencant par: « Les violences qui se sont déroulées dans les rues de Montréal-Nord hier soir sont inacceptables. » Cette organisation nationaliste-populiste soutenue par la plupart des groupes se disant de gauche au Québec, ne dénonce pas les flics mais les « émeutiers »! Se lamentant sur le « malaise social » dans des quartiers comme Montréal-Nord, Québec Solidaire propose « un dialogue le plus ouvert possible » pour « mettre fin au climat de méfiance et de suspicion qui règne entre les jeunes et les autorités policières ».

Face à ces appels éculés à réformer le système capitaliste raciste, il faut comprendre que l’Etat — c’est-à-dire les flics, les tribunaux et les prisons — est un instrument de domination de la classe capitaliste, pour réprimer la classe ouvrière et tous les opprimés. On ne peut pas le réformer pour qu’il réponde aux besoins des ouvriers et des opprimés. Il faut le détruire et le remplacer par le pouvoir ouvrier.

Le mouvement ouvrier de la région de Montréal devrait être a l’avant-garde des protestations contre le meurtre de Fredy Villanueva par les flics racistes. Dans des manifestations centrées sur la classe ouvrière, la puissance sociale de la classe ouvrière pourrait se joindre à la colère des jeunes des minorités opprimées, montrant ainsi la voie à tous ceux qui subissent les attaques de la classe capitaliste au pouvoir. Comme nous l’écrivions l’an dernier:

« Les attaques de la bourgeoisie contre les immigrés et les minorités ethniques — les secteurs les plus vulnérables et les plus exploités de la classe ouvrière — sont un poison pour les luttes ouvrières. Les Musulmans et les autres minorités ethniques constituent une part croissante de la classe ouvrière dans la région de Montréal. Ce fait souligne simplement que de gagner contre les patrons exige de défendre l’unité et l’intégrité de la classe ouvrière contre la démagogie raciste anti-immigrée. Une attaque contre un est une attaque contre tous ! Pleins droits de citoyenneté pour tous les immigrés ! »

— « Le mouvement ouvrier doit combattre la réaction anti-musulmane », supplément à Spartacist Canada, septembre 2007

Chauvinisme et racisme anti-immigrés

Pour que la puissance sociale de la classe ouvrière puisse s’exercer, il faut un combat politique dans les syndicats pour une direction lutte de classe, chassant les dirigeants syndicaux pro-capitalistes traîtres qui subordonnent les intérêts des travailleurs à ceux de leurs exploiteurs. Cela veut dire s’attaquer de front au fait que la classe ouvrière de ce pays est profondément divisée selon des clivages nationaux.

Au Canada anglophone, la bureaucratie syndicale et son bras politique, le Nouveau parti démocratique social-démocrate, cherche à faire croire que les ouvriers ont des intérêts communs avec les capitalistes canadiens. Et leur chauvinisme anti-québécois flagrant est démontré par exemple par le fait que le NPD soutient la Loi sur la clarté, loi anti-démocratique qui rejette le droit à l’autodétermination du Québec. De leur côté, les chefs syndicaux québécois pro-capitalistes soutiennent leurs propres nationalistes bourgeois, représentés par le Parti et le Bloc québécois. La Ligue trotskyste/Trotskyist League est pour l’indépendance du Québec, afin que la question nationale ne se pose plus et que les ouvriers puissent voir clairement tant au Canada anglais qu’au Québec que leurs ennemis, ce sont leurs « propres » capitalistes et non les ouvriers « d’en face ». C’est en suivant cette voie que l’on pourra forger l’unité dans le combat contre le capitalisme entre les ouvriers québécois, les ouvriers anglophones, et les composantes immigrées et minorités de la classe ouvrière.

La nuit de la colère à Montréal-Nord montre que sous la surface les tensions sont profondes dans cette société fondamentalement injuste; mais il faut leur donner un axe et une expression de classe. Aujourd’hui au Québec des dizaines de milliers de jeunes non blancs d’origine immigrée vont dans les mêmes écoles que les Québécois blancs et parlent français avec le même accent. Mais pour les capitalistes, qu’ils soient fédéralistes ou souverainistes, ces jeunes seront toujours des étrangers — qu’ils ne considéreront jamais comme des égaux.

On n’obtiendra justice pour Fredy Villanueva et les nombreuses autres victimes de la violence policière raciste que lorsque le système capitaliste tout entier aura été balayé par une révolution socialiste. La classe ouvrière est la seule force sociale qui a objectivement intérêt à renverser ce système d’exploitation capitaliste, de racisme et de misère, et qui a la puissance nécessaire pour le faire et construire un Etat ouvrier sur la base d’une économie planifiée. Il faut pour cela forger un parti ouvrier révolutionnaire multiracial et binational, et il est nécessaire pour cela que les ouvriers du Canada anglais rompent avec les néo-démocrates chauvins et que les ouvriers québécois abandonnent leurs illusions dans le PQ et les autres nationalistes bourgeois. La Ligue trotskyste/Trotskyist League se bat pour construire un tel parti. Comme nous l’avons écrit il y a 13 ans à la veille du référendum sur la souveraineté du Québec en 1995:

« Le nationalisme et le chauvinisme sont les éléments fondamentaux du cordon qui lie les travailleurs anglophones et francophones à ‘leurs’ propres ennemis capitalistes, les dressant les uns contre les autres et contre tous ceux qui ne sont pas ‘nous’. Ainsi, les Haïtiens francophones de Montréal, les Jamaïcains anglophones de Toronto, les Asiatiques de Vancouver et les peuples aborigènes qui luttent pour l’affirmation de leurs droits sont tous victimes de persécutions racistes et d’une terreur d’Etat ouverte, le tout ‘justifié’ généralement par l’horrible logique du nationalisme qui caractérise et ronge présentement le pays.

« Nous appelons à l’indépendance du Québec pour aider à dégager la voie du combat uni de la classe ouvrière racialement intégrée de l’ensemble du continent contre le système d’exploitation et d’oppression qui menace l’avenir de toute l’humanité. »

— « Pour l’indépendance du Québec ! » SC no 105, septembre/octobre 1995