République ouvrière nº 3

Hiver/printemps 2019

 

À Bas l’« ALENA 2.0 », viol impérialiste du Mexique !

Mexique : Pour un gouvernement ouvrier et paysan !

L’article suivant est réimprimé d’Espartaco (n° 47, août 2017), le journal de nos camarades du Grupo Espartaquista de México. Le 30 novembre 2018, les impérialistes américains et canadiens, aux côtés du Mexique, ont signé une nouvelle version de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) : l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM). Un jour plus tard, Andrés Manuel López Obrador prenait le relais d’Enrique Peña Nieto en tant que président du Mexique. Dès le début, nous nous sommes opposés à l’ALENA, un accord entre les impérialistes américains et leur partenaire junior canadien pour le viol impérialiste du Mexique. Nous sommes tout aussi opposés à sa nouvelle mouture sous l’ACEUM, qui renforcera l’exploitation des travailleurs à travers toute l’Amérique du Nord et particulièrement au Mexique. La bourgeoisie canadienne est tout sauf une « victime » des impérialistes américains et elle compte bénéficier grandement de l’approfondissement de la subjugation économique du Mexique, notamment à travers ses investissements miniers qui sont hautement profitables.

En renégociant cet accord, les impérialistes américains ont cherché, entre autres choses, à pénétrer davantage le marché canadien du lait, protégé par le système de la gestion de l’offre. Au Québec, l’opposition à ces mesures a servi de cri de ralliement nationaliste. Cette réponse découle largement du fait que la bourgeoisie canadienne-anglaise n’a pas hésité à sacrifier une partie du marché laitier — ce qui impacte particulièrement les producteurs québécois — pour protéger l’industrie automobile, surtout concentrée en Ontario. Les marxistes ne sont pas indifférents au sort des petits producteurs qui seront affectés par les concessions des libéraux au pouvoir et auxquelles nous sommes opposés. Seule une économie planifiée sous le pouvoir ouvrier pourra s’attaquer aux problèmes qui affectent les couches opprimées de la petite bourgeoisie comme les petits producteurs fermiers.

Pour la bourgeoisie canadienne, le protectionnisme et le « libre-échange » sont deux options économiques dont elle peut débattre. Mais pour les travailleurs, le protectionnisme est un poison. Un parfait exemple de ceci est le protectionnisme de la direction du syndicat de l’industrie automobile Unifor. Loin de s’opposer à l’accord de libre-échange, Jerry Dias, le dirigeant du syndicat, a joué le rôle de « conseiller informel » pour le gouvernement de Trudeau lors des négociations. Même si Dias déplore de façon hypocrite les salaires de misère des travailleurs mexicains, une déclaration officielle d’Unifor louange les dispositions de l’ACEUM qui renforceront l’industrie automobile canadienne et américaine aux dépens de celle au Mexique : il s’agit d’une attaque directe contre les travailleurs mexicains.

Lorsque General Motors a annoncé ses plans de fermer son usine d’Oshawa en Ontario, Dias a répondu non pas avec un programme de lutte des travailleurs contre les patrons, mais plutôt avec un appel raciste et pro-impérialiste au boycott des automobiles GM fabriquées au Mexique. Cet appel est d’autant plus répugnant qu’il survient dans le contexte d’une grève massive de dizaines de milliers de travailleurs des usines maquiladoras à Matamoros, dont plusieurs dans l’industrie des pièces automobiles. En contraste flagrant avec cette trahison de classe, notre point de départ est celui de l’internationalisme prolétarien et pour des luttes de classe unies pour briser l’ACEUM.

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Non seulement le démagogue raciste Donald Trump n’a cessé de répéter que le Mexique allait payer pour son mur contre les immigrants, mais il a passé une bonne partie de sa campagne présidentielle à pester contre l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) qui, selon lui, « profite davantage au Mexique », et il a promis que les États-Unis allaient sortir du « pire traité de l’histoire ». Le 26 avril 2017, devenu entre-temps commandant en chef impérialiste, il a annoncé qu’il chercherait plutôt à « renégocier » le traité afin de le rendre encore plus avantageux pour les États-Unis. Ce qui est sûr c’est que, en un peu plus de deux décennies, l’ALENA a signifié l’augmentation des profits et du pouvoir des dirigeants américains et de leurs partenaires juniors canadiens, au prix de la surexploitation des travailleurs et de la misère des paysans au Mexique. Après l’annonce de la Maison-Blanche, le gouvernement du laquais Peña Nieto s’est félicité, déclarant qu’« aujourd’hui nous avons une grande occasion pour mettre à jour cet accord de libre-échange et ce que nous allons rechercher c’est que ce soit pour le bénéfice, la croissance, le développement et la compétitivité de l’Amérique du Nord ».

Ayant le malheur de partager une frontière de plus de 3000 km avec son voisin du Nord, le Mexique est la principale néocolonie des États-Unis. C’est un exportateur de produits manufacturés parce que c’est un énorme importateur de capitaux. Les investissements américains au Mexique ont atteint en 2015 près de 93 milliards de dollars. Les échanges commerciaux entre les deux pays atteignaient en 2016 un total estimé à près de 580 milliards de dollars, un chiffre dépassé uniquement par celui du commerce américain avec la Chine et le Canada. Le fameux « déficit commercial » américain par rapport au Mexique (55,6 milliards de dollars en 2016) qui fait tant fulminer Trump est dû avant tout aux exportations des entreprises américaines établies au Mexique, y compris des grands consortiums monopolistes tels que Ford et General Motors, qui rapatrient leurs énormes profits aux États-Unis. L’économie mexicaine est également liée aux impérialistes par les emprunts d’État : entre 2000 et 2015, le paiement du principal et des intérêts de la dette extérieure publique (plus de 516 milliards de dollars) représentait sept fois le solde de cette même dette en l’an 2000. Nous disons : Répudiation de la dette !

L’objectif fondamental du traité est de permettre à la bourgeoisie impérialiste américaine de retrouver une certaine compétitivité vis-à-vis de ses rivaux allemand et japonais, qui sont plus dynamiques économiquement (et avec lesquels, d’ailleurs, les États-Unis ont des déficits commerciaux encore plus grands qu’avec le Mexique). Face au déclin économique américain, Trump cherche entre autres à restreindre certaines exportations vers les États-Unis, à réduire encore davantage le secteur public mexicain face aux capitaux privés impérialistes, à soumettre les différends à des tribunaux américains, et carrément à limiter la capacité des pays signataires de dévaluer leur monnaie. Cette dernière mesure porterait atteinte à la souveraineté du Mexique par rapport à son voisin et menacerait les masses exploitées et opprimées d’une aggravation de la famine et de la misère, comme le montre l’exemple de la Grèce et d’autres pays dépendants dans l’Union européenne, ce consortium impérialiste vampire qui enchaîne ces pays à l’euro au profit des capitalistes allemands.

Au Mexique, le premier ministre canadien Justin Trudeau est souvent perçu comme un allié qui ferait contrepoids au fou furieux Trump. Mais le Canada est lui-même une puissance impérialiste, bien que de moindre envergure et subordonnée aux États-Unis. La brutalité et la cupidité de l’industrie minière canadienne, particulièrement en Amérique latine, mettent à nu l’absurdité de l’idée que le Canada serait une puissance charitable sur la scène mondiale. Ses prétentions « multiculturelles » ne sont qu’une façade pour couvrir le fait que le Canada anglophone, Trudeau en tête, maintient assujettie par la force à l’intérieur de ses frontières une nation tout entière, le Québec francophone. De plus, les bourgeoisies américaine et canadienne se servent de l’ALENA pour accroître l’exploitation de leur propre classe ouvrière tout en usant de démagogie contre le prolétariat des différentes nations qui soi-disant « nous volent les emplois ». Ce qu’il faut, c’est la lutte internationaliste des travailleurs : Pour une lutte de classe commune contre les dirigeants capitalistes aux États-Unis, au Canada et au Mexique ! Pour l’indépendance du Québec !

Rivalités interimpérialistes et pillage néocolonial

L’impérialisme est la phase suprême du capitalisme. Il est caractérisé par la formation de monopoles, l’exportation de capital financier et le partage du monde entre une poignée de puissances disposant d’armées et de flottes pour défendre leurs intérêts — y compris dans des guerres entre ces puissances pour se rediviser le monde. Comme nous l’a enseigné Lénine :

« Ce qui caractérisait l’ancien capitalisme, où régnait la libre concurrence, c’était l’exportation des marchandises. Ce qui caractérise le capitalisme actuel, où règnent les monopoles, c’est l’exportation des capitaux [...].

« Tant que le capitalisme reste le capitalisme, l’excédent de capitaux est consacré, non pas à élever le niveau de vie des masses dans un pays donné, car il en résulterait une diminution des profits pour les capitalistes, mais à augmenter ces profits par l’exportation de capitaux à l’étranger, dans les pays sous-développés. »

— L’impérialisme, stade suprême du capitalisme (1916)

La signature de l’ALENA faisait partie d’une offensive capitaliste mondiale déclenchée par la destruction contre-révolutionnaire de l’URSS en 1991-1992, une gigantesque défaite pour les travailleurs qui a façonné le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. Un monde où l’impérialisme américain, se croyant dans son arrogance omnipotent, patrouille la planète missiles à la main, sûr de ne rencontrer aucune véritable opposition. Avec la disparition de ce puissant « ennemi commun » qu’était l’Union soviétique, les rivalités économiques entre les puissances impérialistes sont revenues au premier plan.

Les spartacistes s’opposent à l’ALENA depuis le début. Il ne s’agit pas de « renégocier » ce traité, il faut le faire tomber ! Au début des négociations entre les gouvernements de Carlos Salinas et de George Bush père en 1991, le Grupo Espartaquista de México, la Spartacist League/U.S. et la Ligue trotskyste du Canada [ancien nom de la Ligue trotskyste au Québec et au Canada], sections de la Ligue communiste internationale (LCI), avaient publié une déclaration internationaliste contre le traité (voir Espartaco n° 2, été-automne 1991). Nous y expliquions :

« Loin de ‘‘libéraliser’’ le commerce à l’échelle internationale, le traité a pour objectif la création d’un terrain de chasse privé pour la bourgeoisie impérialiste américaine, ses partenaires juniors canadiens et ses laquais de la classe dirigeante mexicaine. Déjà à l’époque de la Première Guerre mondiale, Lénine soulignait que les limites étroites de l’État-nation capitaliste étaient devenues un obstacle au développement des forces productives, donnant lieu à une lutte pour une nouvelle division du monde. Les différents ‘‘marchés communs’’ ne changent rien à cela ; ils intensifient au contraire les rivalités entre impérialistes. Nous, les trotskystes, les communistes, nous luttons pour l’intégration économique du monde sur des bases socialistes. Mais l’ALE [ALENA] est une étape réactionnaire vers la guerre commerciale mondiale (et de là vers une guerre véritable). Le pacte commercial avec le Mexique est la réponse de l’impérialisme américain au IVe Reich et au Japon Inc. »

Dévastation des campagnes mexicaines

Le Mexique compte environ 20 millions de paysans. Sur 5,4 millions d’exploitations rurales, seules 0,3 % sont considérées comme des « entreprises dynamiques », c’est-à-dire de grandes exploitations capitalistes modernes, principalement dans le Nord du pays — les koulaks, qui font partie de la minuscule poignée de capitalistes mexicains qui se sont enrichis grâce à l’ALENA. Plus de 80 % des paysans vivent dans la pauvreté et produisent principalement pour la consommation domestique. Dépourvus de financements suffisants, ils ont des techniques de production obsolètes, voire ancestrales. Par-dessus le marché, une grande partie de leurs terres ne sont même pas cultivables.

Comme nous l’avions dit il y a plus de 23 ans, la libéralisation du commerce d’un pays arriéré comme le Mexique avec les États-Unis et son industrie agricole hautement technique, productive et subventionnée (en 1994, la productivité de l’agriculture des États-Unis était dix fois plus élevée que celle du Mexique) ne pouvait signifier qu’une condamnation à mourir d’inanition pour des milliers de paysans. Le traité a apporté une dévastation encore pire à des campagnes mexicaines déjà paupérisées. En fait, les produits agricoles mexicains, comme la tomate, ont perdu de leur compétitivité sur le marché américain, y compris par rapport à des pays qui n’ont pas de libre-échange avec les États-Unis. Le gouvernement mexicain, ouvrant le pays sans restriction à l’impérialisme, a éliminé les anciennes subventions aux petits producteurs ruraux et aux consommateurs urbains. Aujourd’hui, le Mexique importe des denrées de base comme le maïs et autres céréales, le porc et le bœuf, ainsi que l’essence, causant une inflation galopante. Incapables de rivaliser avec les entreprises agricoles capitalistes modernes, des millions de paysans pauvres ont été contraints d’abandonner leurs terres et d’émigrer vers les villes, où ils sont condamnés à vivre de la mendicité, du colportage ou de la prostitution ; ou d’émigrer vers le pays du Nord.

Un sous-comité du Congrès américain a déjà approuvé 1,6 milliard de dollars pour la construction du mur avec le Mexique — qui, bien sûr, sera beau, transparent et respectueux de la planète puisqu’il y aura des panneaux solaires. Trump enhardit les forces de la terreur anti-immigrants, police des frontières, maraudeurs racistes ou fascistes déclarés. Mais sa politique n’est qu’une expression plus grotesque — sans les pieux discours « humanitaires » — de celle de ses prédécesseurs démocrates. Il suffit de se rappeler qu’Obama a déporté plus de monde que tout autre président dans l’histoire. Bien que l’ALENA ait entraîné une augmentation graduelle du nombre de migrants, cette soupape s’est refermée à partir de 2007. Le flux a diminué considérablement suite à la grande récession amorcée en 2008 ainsi qu’aux mesures contre les immigrants mises en œuvre par le gouvernement démocrate.

Le capitalisme crée son propre fossoyeur

La « libre concurrence » avec les États-Unis exige du capitalisme mexicain qu’il intensifie sa campagne pour la « compétitivité » par une guerre permanente contre les syndicats et les acquis des travailleurs. Ainsi, conformément aux exigences d’organismes impérialistes tels que le FMI et la Banque mondiale, les dirigeants capitalistes mexicains lancent depuis trente ans une salve de « réformes structurelles » destinées à extraire la sueur et le sang des travailleurs jusqu’à la dernière goutte. Et c’est précisément la main-d’œuvre bon marché et la brutalité des conditions de travail du Mexique qui attirent les capitalistes voraces des États-Unis, du Canada, de l’Allemagne et d’autres puissances. Avec la récente privatisation du secteur énergétique — dont nous trotskystes avons défendu la nationalisation, comme mesure d’autodéfense élémentaire du Mexique semi-colonial — le pétrole est devenu l’une des cibles de la « renégociation ».

Le Mexique est un pays au développement inégal et combiné, où les formes les plus ancestrales de la petite production paysanne coexistent avec le dernier cri en matière de grande production industrielle. L’industrie automobile est devenue la principale source de devises du Mexique — avant le pétrole, les envois de fonds et le tourisme ; elle représente plus du tiers des exportations de produits manufacturés. Le Mexique est aujourd’hui le septième producteur mondial de véhicules, le quatrième exportateur de voitures et le sixième producteur de pièces automobiles. L’importance de l’industrie automobile est bien plus grande encore, car elle a de multiples articulations avec d’autres secteurs : industries des biens de consommation intermédiaire (acier, métallurgie, verre, caoutchouc, énergie, etc.), distribution et vente de véhicules, ateliers de maintenance, recherche et développement, etc. Cela a eu comme impact positif de renforcer un secteur clé du prolétariat doté d’un pouvoir social énorme : le capitalisme crée son propre fossoyeur.

Contrairement à la paysannerie qui, en tant que couche sociale, a un intérêt dans la propriété privée de la terre, la classe ouvrière n’a aucun intérêt objectif à préserver le régime de la propriété privée. Comme il n’a que sa force de travail à vendre, son intérêt est dans la collectivisation des moyens de production. Qui plus est, les prolétaires produisent collectivement les richesses de la société, ce qui leur confère une puissance sociale énorme. La classe ouvrière, en raison de ses rapports avec les moyens de production, est la seule à disposer du pouvoir social pour prendre la tête des masses opprimées — en particulier des paysans pauvres — dans la lutte pour renverser ce système d’exploitation.

Révolution permanente contre nationalisme populiste

Devant le protectionnisme virulent de Trump, le Parti de la révolution démocratique (PRD) bourgeois a voulu se positionner comme le meilleur défenseur de l’ALENA. Carlos Navarrete, l’un de ses dirigeants et membres fondateurs, déclarait : « Lorsque nous nous sommes opposés à l’ALENA au siècle dernier, nous n’avions pas anticipé ce que cela pourrait signifier et, aujourd’hui — la vie a de ces paradoxes —, je crois que la gauche doit défendre la validité de l’ALENA. » Laissons de côté l’idée que le PRD soit soi-disant « de gauche » — il ne s’est jamais opposé à l’ALENA ; il avait simplement demandé que le chapitre sur l’agriculture soit renégocié dans des termes moins défavorables. C’est également la position de base du Morena (Mouvement pour la régénérescence nationale) de López Obrador. Bien que López Obrador admette que l’ALENA n’est ni la « panacée » ni le « salut » du Mexique, il a clairement indiqué qu’il est favorable au libre-échange et que, en tant que président, il chercherait à mener la renégociation du traité.

Le Morena est un parti bourgeois qui cherche à se présenter comme une solution de rechange au vu du discrédit du PRD et du mécontentement croissant des masses pauvres. Le PRD et le Morena représentent une aile nationaliste de la bourgeoisie mexicaine qui cherche à revenir à une version ou une autre du vieux populisme du PRI (Parti de la révolution institutionnelle). Ils cherchent à s’appuyer sur le prolétariat pour renégocier les termes de leur propre subordination à l’impérialisme. Dans les pays capitalistes sous-développés, tels que le Mexique, les bourgeoisies nationales faibles sont incapables de rompre avec les impérialistes, auxquels ils sont attachés par mille liens. Les nationalistes populistes et les néolibéraux serviles qui livrent le pays ne diffèrent que par la manière dont ils gèrent le système d’exploitation capitaliste, à la défense duquel ils sont tous dévoués. Les politiciens nationalistes bourgeois craignent par-dessus tout la seule force capable d’en finir avec le joug impérialiste : la classe ouvrière.

Le nationalisme bourgeois — l’idée que tous les citoyens doivent rester unis pour « faire avancer » le pays — constitue le ciment idéologique que les politiciens capitalistes et leurs lieutenants syndicaux utilisent pour maintenir les travailleurs enchaînés à leurs exploiteurs. Mais bourgeois et prolétaires ont des intérêts antagoniques. L’idéologie nationaliste bourgeoise tente de séparer les travailleurs mexicains de leurs véritables alliés : les prolétaires du reste du monde. Rompez avec le PRD et le Morena bourgeois !

Les spartacistes se basent sur la perspective de la révolution permanente de Trotsky, confirmée dans les faits par la Révolution russe de 1917. Les aspirations des travailleurs et des paysans aux droits démocratiques et nationaux et à l’émancipation sociale ne peuvent être satisfaites que par une révolution prolétarienne qui détruise l’État bourgeois et instaure la dictature du prolétariat soutenue par la paysannerie — un gouvernement ouvrier et paysan — sur la base de la collectivisation des moyens de production. La révolution doit s’étendre à l’échelle internationale, en particulier aux pays avancés, car une économie planifiée à l’échelle internationale est le seul moyen pour pouvoir commencer à vraiment éliminer la pénurie et la misère qui affligent l’écrasante majorité de l’humanité aujourd’hui.

Pour une direction lutte de classe dans les syndicats !

Les syndicats sont la première ligne de défense nécessaire contre les attaques capitalistes. Les syndicats mexicains, qui organisent de puissants secteurs de la classe ouvrière, mais qui ne représentent qu’environ 13 % de celle-ci, sont affaiblis après avoir subi une série de défaites, nombre d’entre elles sans combat — notamment la destruction du SME [syndicat des travailleurs de l’électricité]. Ils sont également divisés par le fait que leurs directions sont loyales à des partis bourgeois concurrents. Les directions actuelles des syndicats sont la courroie de transmission de l’idéologie bourgeoise, liant la classe ouvrière à ses ennemis de classe. Ils répandent parmi les travailleurs l’idée suicidaire que l’État capitaliste — dont la raison d’être est de défendre le régime de l’exploitation et de l’oppression — serait un arbitre impartial.

Il n’est pas nécessaire de s’attarder sur les misérables bureaucrates qui suivent le PRI. De leur côté, les soi-disant bureaucrates « indépendants » de l’UNT [Syndicat national des travailleurs] et de la NCT [Nouvelle centrale des travailleurs], associés au PRD et/ou au Morena, veulent un traité commercial qui, selon les termes d’une touchante déclaration qu’ils ont cosignée avec des syndicats américains et canadiens, mène « à un développement durable, soutenable et largement partagé dans toute l’Amérique du Nord ». Son objectif serait « de créer un nouveau modèle commercial qui place les citoyens et la planète avant les profits des grandes entreprises ». Comme l’écrivait Lénine dans L’impérialisme : « Mais alors le capitalisme ne serait pas le capitalisme, car l’inégalité de son développement et la sous-alimentation des masses sont les conditions et les prémisses fondamentales, inévitables, de ce mode de production. »

Depuis le début, la bureaucratie de l’AFL-CIO américaine a dénoncé l’ALENA du point de vue du chauvinisme protectionniste, se mobilisant contre les Mexicains qui « volent des emplois américains ». Le 12 juin 2017, l’AFL-CIO s’est prononcée en faveur de la renégociation complète de l’ALENA et elle a présenté ses « recommandations » dans ce but au gouvernement Trump, proposant entre autres de faire respecter la politique du « Buy American » ; elle réclame aussi des sanctions contre la « manipulation » du taux de change et veut le durcissement des règles d’origine pour les voitures et pièces automobiles. Ainsi, ces bureaucrates corrompus et racistes dirigent leurs attaques contre les travailleurs mexicains au lieu de les diriger contre les impérialistes, responsables de l’exploitation et de l’oppression des masses laborieuses aux États-Unis. En réalité, la bureaucratie syndicale de l’AFL-CIO est un élément clé du Parti démocrate. Elle substitue l’appel à voter pour ce parti bourgeois, tout aussi impérialiste que le Parti républicain, à la lutte de classe nécessaire pour défendre les moyens d’existence des travailleurs.

Les communistes luttent pour renforcer l’organisation des travailleurs et pour qu’ils se syndiquent tous. Nous sommes pour la défense des syndicats existants contre toute attaque de l’État bourgeois. L’indépendance politique du mouvement ouvrier face à l’État et aux partis des patrons est notre principe directeur dans la lutte pour remplacer les directions syndicales procapitalistes actuelles par des directions lutte de classe. La lutte syndicale, bien qu’elle puisse porter des coups importants aux conditions d’exploitation de la classe ouvrière, ne peut à elle seule mettre fin à cette exploitation. Pour gagner cette guerre, il faut combattre pour le pouvoir des travailleurs, sous la direction d’un parti révolutionnaire qui donne au prolétariat la compréhension et la conscience de ses propres intérêts de classe, dans la lutte pour émanciper de l’esclavage capitaliste la classe ouvrière et tous les opprimés.

Pour l’internationalisme prolétarien !

Beaucoup de Mexicains perçoivent à tort les États-Unis comme une masse homogène, réactionnaire et impérialiste — un point de vue basé sur le nationalisme bourgeois. Mais les États-Unis sont une société divisée en classes. La classe ouvrière et les opprimés du Mexique et ceux des États-Unis ont un intérêt en commun : la révolution socialiste. Nos camarades américains luttent pour mobiliser la classe ouvrière multiraciale américaine — y compris ses puissantes composantes noire et latino — contre les desseins de l’impérialisme yankee. Ils luttent pour les pleins droits de citoyenneté pour tous les immigrants ; c’est un moyen concret de créer des liens de solidarité entre les deux prolétariats, dans une perspective de lutte de classe contre les partis bourgeois républicain et démocrate. Les luttes du prolétariat mexicain contre ses exploiteurs capitalistes nationaux et contre le pillage néocolonial sont intimement liées à la lutte pour le pouvoir des travailleurs aux États-Unis, cœur de l’impérialisme mondial, avec ses millions de prolétaires. La Ligue communiste internationale lutte pour construire des sections nationales d’une Quatrième Internationale reforgée, le parti mondial de la révolution socialiste, qui organise et éduque la classe ouvrière dans un esprit d’hostilité intransigeante envers les déprédations de l’impérialisme et la domination capitaliste elle-même.