Le Bolchévik nº 194 |
Décembre 2010 |
Procès colonial en Martinique
Levée des poursuites contre Ghislaine Joachim-Arnaud !
Paris, 16 décembre Ghislaine Joachim-Arnaud, secrétaire générale de la CGTM (Confédération générale des travailleurs martiniquais) et dirigeante de Combat ouvrier, organisation martiniquaise et guadeloupéenne associée à Lutte ouvrière en France, était convoquée hier au tribunal de Fort-de-France. Elle est poursuivie par un capitaliste blanc descendant des grandes familles esclavagistes de l’île, Jean-François Hayot, pour « incitation à la haine raciale ». Joachim-Arnaud, une femme noire, est poursuivie pour avoir écrit en créole ce que disaient des milliers d’autres Martiniquais pendant la grève générale de février 2009, « la Martinique est à nous ; une bande de békés, profiteurs, voleurs ; on va les foutre dehors. »
Les békés sont les descendants des esclavagistes blancs qui continuent à régner sur la Martinique, où la division de classe entre capitalistes, petits-bourgeois et travailleurs recouvre encore largement une division raciale allant du blanc vers le noir. Un béké martiniquais très connu, Alain Huygues-Despointes, s’était distingué lors de cette grève générale avec un reportage diffusé sur Canal+ où il déclarait que les békés ne se mariaient pas avec les Noirs, et qu’il voulait « préserver sa race ». C’est le comble de l’arrogance coloniale pour les békés de poursuivre pour racisme une militante noire. Le parquet a requis 1 500 euros d’amende à l’encontre de Joachim-Arnaud, le jugement étant mis en délibéré au 2 mars. Le mouvement ouvrier des Antilles et de France doit se mobiliser pour mettre en échec la vindicte coloniale contre Joachim-Arnaud Etat colonial raciste, bas les pattes devant Joachim-Arnaud ! Levée immédiate des poursuites !
En persécutant Joachim-Arnaud la semaine même où était appelée une nouvelle grève générale en Guadeloupe, et presque 51 ans jour pour jour après le massacre colonial de trois travailleurs martiniquais en décembre 1959, l’Etat capitaliste français cherche à étouffer les protestations contre le fait que toutes les promesses faites lors de la grève de l’année dernière sont une à une vidées de tout contenu. L’Etat veut faire taire la CGTM, le K5F (le collectif de front populaire qui avait dirigé la grève générale en Martinique l’année dernière, et dont Joachim-Arnaud est aussi dirigeante), Combat ouvrier et le reste de la gauche. Il se sert pour cela des lois soi-disant contre le racisme, que nous avons toujours dénoncées comme des lois servant en réalité à renforcer les pouvoirs répressifs de l’Etat contre les travailleurs et les opprimés y compris quand c’est un dirigeant du PCF, Jean-Claude Gayssot, ex-ministre du gouvernement capitaliste de Jospin, qui l’avait parrainée.
Pour notre part, étant farouchement opposés au colonialisme français, nous serions en faveur de l’indépendance des colonies françaises. Mais nous sommes contre imposer l’annexion, la fédération ou même l’indépendance à un peuple quelconque, et donc nous ne revendiquons actuellement pas l’indépendance de la Martinique, notamment du fait que la grande majorité de la population y est opposée. Pour en finir avec la misère, l’exploitation capitaliste et l’oppression coloniale et raciale il n’y a d’autre solution que de lutter pour un gouvernement ouvrier en Martinique qui expropriera l’ensemble de la classe capitaliste et luttera pour des Caraïbes socialistes fédérées, où les Blancs acceptant le pouvoir des travailleurs auront toute leur place. Quant aux paroles reprochées à Joachim-Arnaud, elles montrent la capitulation politique des camarades antillais de Lutte ouvrière devant le nationalisme petit-bourgeois, dont le programme est d’ailleurs de partager aux dépens des travailleurs la rente coloniale aujourd’hui monopolisée par les békés, plutôt que de jeter les békés à la mer (voir nos articles parus dans le Bolchévik n° 189 et 192).
La lutte pour la révolution socialiste dans les Antilles est intimement liée à la lutte pour la révolution socialiste dans la métropole coloniale française et à l’extension de la révolution dans le reste des Caraïbes et de l’Amérique centrale, et aux Etats-Unis. Nous luttons pour construire le parti ouvrier révolutionnaire internationaliste indispensable à la victoire de ce programme. Levée des poursuites contre Joachim-Arnaud ! Troupes, flics et juges français, hors de Martinique, Guadeloupe et Guyane !