Le Bolchévik nº 194

Décembre 2010

 

A bas la répression contre les grévistes et les jeunes !

Leçons des grèves de l’automne en défense des retraites

Non à un nouveau front populaire ! Pour un parti ouvrier révolutionnaire !

1er novembre – La lutte ouvrière en défense des retraites face aux attaques du gouvernement représente une des plus intenses batailles de classe que le pays ait connues depuis des années. La grève dans les raffineries et les principaux ports pétroliers, qui était au centre du mouvement, a réussi à fermer les douze raffineries du pays jusqu’à ce que le travail reprenne la semaine dernière. Les grèves à la SNCF et dans les transports urbains et les aéroports ont paralysé les transports tandis que la pénurie contraignait à la fermeture les stations-service aux quatre coins du pays et commençait à menacer l’industrie dépendante du pétrole. La grève des ports pétroliers de Marseille et alentour a duré 33 jours et laissé quelque 80 navires en rade dans la Méditerranée. Les éboueurs ont cessé de collecter les ordures dans plus de dix villes, et à Marseille 11 000 tonnes de déchets se sont accumulées dans les rues.

Dans tout le pays, des millions de personnes se sont mobilisées dans la rue tout au long de septembre et d’octobre. Pourtant, défiant l’opposition de l’immense majorité de l’opinion publique à cette « réforme » des retraites voulue par Nicolas Sarkozy, le parlement a définitivement adopté la loi qui porte à 62 ans l’âge minimum de départ à la retraite, et à 67 ans celui pour bénéficier du taux plein – une augmentation de deux ans.

Fermement déterminé à améliorer la compétitivité du capitalisme français face à ses rivaux impérialistes, Sarkozy n’a pas lésiné sur les moyens pour faire plier les grévistes. Des centaines de CRS ont été déployés pour débloquer de force les raffineries, dépôts pétroliers et autres sites industriels. La ville de Donges, près de Nantes, où se trouve l’une des plus grandes raffineries du pays, a été mise en état de siège par une armée de CRS. A la raffinerie de Grandpuits, près de Paris, les grévistes ont reçu l’ordre, au nom de la « défense nationale », de se remettre au travail sous peine de faire six mois de prison. Depuis mi-octobre, le gouvernement a arrêté pas moins de 2 500 personnes.

Ces attaques contre les grévistes, contre le droit même de faire grève, se sont accompagnées de violences policières systématiques contre les lycéens, tout particulièrement ceux de l’enseignement professionnel où les jeunes d’origine immigrée sont nombreux. Les jeunes ont rejoint les cortèges en grand nombre, conscients que le recul de l’âge de la retraite ne peut que faire gonfler plus encore les chiffres du chômage des jeunes, qui atteignent déjà 23 % pour les moins de 25 ans. La jeunesse des lycées s’était déjà mobilisée à de nombreuses reprises ces dernières années, notamment contre les réductions d’effectifs dans l’Education nationale. Quelque 50 000 postes d’enseignants ont disparu depuis 2007, tandis que les seules augmentations de crédits sont réservées à la « sécurité » : patrouilles de police et vigiles. Exigeons l’abandon des poursuites contre les grévistes et les lycéens ! Libération immédiate de tous les jeunes emprisonnés !

A travers toute l’Europe, les capitalistes sont résolus à faire payer aux travailleurs le prix de la crise économique internationale, ce qui implique le démembrement des systèmes de retraite, la réduction drastique des salaires de la fonction publique, bref tout ce qui reste des programmes sociaux de l’« Etat-providence » doit passer sur le billot. La pilule passe mal, comme en témoignent les nombreuses journées de grève générale qui ont rythmé l’année – pas moins de six rien qu’en Grèce, une autre appelée fin novembre au Portugal. Mais la combativité des travailleurs se heurte au programme politique de la bureaucratie syndicale, qui ne cherche qu’à tenter d’amortir les « excès » de l’austérité capitaliste.

En France, le mouvement syndical est morcelé en fédérations concurrentes sous l’influence d’un parti réformiste ou d’un autre. Pour ces réformistes, le combat des ouvriers pour les retraites doit avant tout servir à « affaiblir » Sarkozy pour ouvrir la voie à l’élection d’un gouvernement « de gauche » lors des présidentielles et des législatives de 2012. Olivier Besancenot, le porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste (NPA), déclarait ainsi que « beaucoup de l’issue de 2012 se joue dans la bataille des retraites. C’est maintenant qu’il faut affaiblir le gouvernement et la droite » (Tout est à nous, 2 septembre).

La combativité des travailleurs a été sabotée par une direction syndicale servile. Dévoués à la cause du capitalisme français, les bureaucrates concèdent qu’une « réforme » est nécessaire afin de diminuer le coût des retraites – au fond tout ce qu’ils demandent c’est de se faire accepter à la table des négociations. Ils ont depuis des mois juré qu’ils acceptaient une augmentation de la durée des cotisations (CFDT) ou au moins un accroissement des cotisations retraites déduites des salaires ouvriers (CGT). Libération (22 octobre) a rapporté que « secrètement, plusieurs dirigeants confédéraux ne verraient pas d’un mauvais œil un essoufflement de la mobilisation afin de siffler la fin de la partie ».

Depuis le début du mouvement, l’intersyndicale – une coalition de bureaucrates représentant les diverses fédérations syndicales, et soutenue par les organisations de gauche, y compris le NPA et Lutte ouvrière (LO) – a tout misé sur une série de « journées d’action » organisées au rythme des débats parlementaires – au moment du débat à l’Assemblée, puis du vote au Sénat, etc. –, avec comme objectif d’arracher quelques concessions sur les détails de la loi.

Nombreux sont ceux qui, à la fin d’une grève âprement disputée, sont retournés au travail en maudissant Sarkozy et en jurant de le mettre au chômage en 2012. Et c’est bien là la question : dans quelle direction cette rage va-t-elle se focaliser ? Sera-t-elle canalisée derrière un nouveau gouvernement de front populaire, dans lequel des partis ouvriers réformistes administrent les affaires de l’Etat bourgeois en alliance avec les partis de l’ennemi de classe capitaliste ? Sera-t-elle détournée par la bourgeoisie et les bureaucrates syndicaux vers le chauvinisme et le racisme anti-immigrés ? Ou bien le prolétariat va-t-il au contraire se mobiliser indépendamment pour défendre ses intérêts de classe ? Au bout du compte, c’est une question de direction. Cela souligne la nécessité de forger un parti ouvrier révolutionnaire reposant fermement sur la conception marxiste que le système capitaliste doit être renversé par une révolution socialiste.

Depuis notamment la destruction contre-révolutionnaire de l’Union soviétique en 1991-1992, les dirigeants ouvriers réformistes et l’« extrême gauche » ont avalé la « mort du communisme », une croisade capitaliste décrivant mensongèrement le communisme comme, au mieux, une « expérience ratée ». En intervenant dans le mouvement et les grèves, comme dans toutes nos activités, la Ligue trotskyste de France (LTF), section de la Ligue communiste internationale (LCI), défend et réaffirme le programme révolutionnaire du bolchévisme et les idéaux libérateurs du communisme.

Les capitalistes qui ont le pouvoir ont maintes fois démontré qu’ils sont hostiles au progrès humain. Nous avons pour but de construire un parti ouvrier révolutionnaire multiethnique pour diriger la lutte pour la révolution socialiste, alors que les réformistes prêchent l’inviolabilité de l’ordre capitaliste. Comme l’écrivait en 1938 le dirigeant bolchévique Léon Trotsky : « Si le capitalisme est incapable de satisfaire les revendications qui surgissent infailliblement des maux qu'il a lui-même engendrés, qu'il périsse ! » (Programme de transition)

Le front populaire : une illusion mortelle pour les travailleurs

Qu’il soit aux mains de la droite ou de la gauche, le gouvernement capitaliste est au service de la bourgeoisie aux dépens des ouvriers et des opprimés. Il n’est pas besoin de regarder plus loin que de l’autre côté des Pyrénées pour voir comment un gouvernement de gauche chercherait à démanteler les acquis de la classe ouvrière. Le gouvernement PSOE (Parti socialiste ouvrier d’Espagne) de José Luis Zapatero cherche aussi à imposer des mesures d’austérité, dont l’augmentation de l’âge de la retraite. Le nouveau code du travail du PSOE peut être considéré comme similaire au CPE – mais pour tout le monde, pas seulement les jeunes. (Voté en 2006 mais retiré face aux protestations, le « Contrat première embauche » soumettait les nouveaux embauchés de moins de 26 ans à une période d’essai de deux ans pendant lesquels ils pouvaient être licenciés sans motif). Zapatero a envoyé ses flics disperser les piquets de grève lors de la grève générale du 29 septembre contre ce nouveau code du travail, et il a même été fait usage d’armes à feu contre les grévistes de l’usine aéronautique CASA près de Madrid.

Mais les directions syndicales prêchent aux travailleurs que le gouvernement du PSOE est « leur » gouvernement. Après l’annonce de la nouvelle loi en juin, les syndicats ont appelé à une journée de grève générale… pour trois mois plus tard, une façon de demander poliment l’autorisation du gouvernement. La réaction de ce dernier, à l’issue de la journée du 29 septembre, a été de nommer Valeriano Gómez, gros bonnet de la fédération syndicale UGT, au poste de ministre du Travail en charge de la « réforme » des retraites !

En France, les gouvernements bourgeois de gauche prennent la forme de « fronts populaires », c’est-à-dire d’une coalition entre des partis ouvriers réformistes et des représentants directs de la bourgeoisie. Les révolutionnaires s’opposent inconditionnellement à ces alliances, car en pratiquant ainsi ouvertement la collaboration de classes, les dirigeants de la classe ouvrière enchaînent cette dernière à la classe ennemie. Tout au long de l’histoire, le rôle du front populaire a été de désamorcer les luttes des travailleurs, d’éloigner le spectre d’une révolution ouvrière et de mener les travailleurs à une défaite le plus souvent sanglante. Lors de la grève générale de 1936, le front populaire d’alors – comprenant les sociaux-démocrates, le Parti communiste stalinien et, côté bourgeoisie, le Parti radical – étouffa une situation pré-révolutionnaire en canalisant le mouvement vers le terrain parlementaire, ce qui a finalement conduit au vote en 1940 des pleins pouvoirs à Pétain, le maréchal pro-nazi.

La destruction de l’Union soviétique a entraîné dans le monde une profonde, quoique inégale, régression du niveau de conscience politique : même les ouvriers plus avancés ne conçoivent plus le socialisme comme le but ultime de leurs combats. Mais même si les bourgeoisies d’Europe occidentale n’ont pas à craindre une révolution rouge dans un proche avenir, le front populaire reste un instrument utile, souvent plus efficace qu’un gouvernement de droite quand il s’agit de faire passer des mesures anti-ouvrières. C’est le gouvernement de front populaire de François Mitterrand et Michel Rocard qui a publié en 1991 le « livre blanc » sur les retraites d’où est sorti, deux ans après, l’allongement de la durée de cotisation de 37 ans et demi à 40 ans dans le secteur privé. En décembre 1995, une vague de grèves combatives a forcé le gouvernement de droite à abandonner son plan de réduction des retraites du secteur public. Mais la combativité et l’esprit de sacrifice des travailleurs ont été trahis par une direction traîtresse. Il en est résulté de nouvelles élections en 1997 qui ont porté au pouvoir un nouveau gouvernement de front populaire, avec le socialiste Lionel Jospin comme Premier ministre, et avec plusieurs ministres PCF. C’est sous Jospin que fut publié le « rapport Charpin » qui, entre autres choses, proposait de relever l’âge de la retraite allant jusque 65 ans et sur lequel les attaques d’aujourd’hui sont modelées.

La lutte pour une direction révolutionnaire du prolétariat

Face à la détermination de Sarkozy, nombreux sont les travailleurs combatifs qui comprenaient que des « journées d’action » isolées ne suffiraient pas. Souvent sous l’impulsion des cheminots, de petites initiatives locales, en général éphémères, se sont multipliées, un bouillonnement anarchique dépourvu de plan. En décembre 1995 les cheminots et les traminots avaient été à l’avant-garde de la lutte qui avait mis à genoux le gouvernement Chirac-Juppé en bloquant les transports pendant trois semaines. La situation de ces travailleurs est maintenant beaucoup plus difficile car les bureaucrates ont négocié avec les patrons la mise en place d’un service minimum, en conformité avec la loi de 2007 sur le « dialogue social ».

Les bureaucrates syndicaux acceptent le cadre du capitalisme et n’osent demander que ce qu’ils estiment compatible avec le maintien et la prospérité de leur propre classe dominante, dont ils espèrent simplement obtenir quelques miettes. L’opportunisme syndical est donc par nature étroitement national, et les bureaucrates souvent contribuent eux-mêmes à répandre le poison du chauvinisme dans la classe ouvrière.

Tout cela ne fait que saper les luttes de la classe ouvrière, comme on peut le voir dans le combat des ouvriers des raffineries qui, à la pointe de la lutte en défense des retraites, ont aussi fait grève à cause des menaces qui pèsent sur leurs emplois. Du point de vue des capitalistes, il y a une douzaine de raffineries de trop en Europe, les exportations d’essence vers les USA s’étant effondrées avec la récession. En France, les tribunaux viennent d’autoriser la fermeture définitive de la raffinerie de Dunkerque, et Petroplus vient d’annoncer celle de Reichstett près de Strasbourg.

Il fallait que les travailleurs des raffineries françaises se tournent vers leurs frères de classe allemands, hollandais, italiens, etc., pour empêcher la livraison en France de produits raffinés pour briser la grève. D’après lemonde.fr (26 octobre), des syndicalistes belges ont bloqué un dépôt de carburant de Total à Feluy, en Belgique, pour stopper toute cargaison à destination de la France. Mais la possibilité d’une telle lutte de classe internationaliste est sapée par la perspective nationaliste des bureaucrates syndicaux, car de leur point de vue nationaliste, s’il doit y avoir des fermetures d’usine en Europe, autant qu’elles touchent les autres pays (en opposition à cela, lire la déclaration commune des sections britannique, allemande et française de la LCI, « Pour une lutte de classe internationale commune contre les patrons d’Airbus ! », le Bolchévik n° 179, mars 2007).

Les enjeux posent de façon criante la nécessité d’une nouvelle direction, une direction révolutionnaire du prolétariat. Cela nécessite une lutte politique contre la direction actuelle de la classe ouvrière, y compris les militants de LO et du NPA à l’intérieur des syndicats qui donnent une couverture de gauche à la bureaucratie.

Une direction révolutionnaire lutterait pour toute une série de revendications transitoires qui prennent comme point de départ le niveau de conscience actuel des couches les plus larges de la classe ouvrière et le combat quotidien de celle-ci contre les patrons, en les orientant vers la nécessité d’une révolution prolétarienne. Il faut absolument se battre pour l’abolition des innombrables différences de statut entre les travailleurs (stagiaires, intérimaires, CDD, CDI…) et le passage à plein temps pour tous ceux (notamment les femmes) qui ne trouvent aujourd’hui que du travail à temps partiel. Cela rend nécessaire de lutter pour des crèches et garderies gratuites et de qualité, ouvertes 24 heures sur 24. Contre le chômage de masse, qui touche le plus durement les plus jeunes et les plus vieux, il faut lutter pour le partage du travail entre toutes les mains disponibles sans perte de salaire.

Il faut lutter contre la discrimination raciste à l’embauche et exiger la levée de toutes les restrictions au droit du travail imposées aux travailleurs d’Europe de l’Est (et qui visent notamment les Roms de Roumanie) et d’une façon plus large les pleins droits de citoyenneté pour tous ceux qui sont ici, avec ou sans papiers, travailleurs ou pas, avec le voile ou pas. La « guerre contre le terrorisme » menée par le gouvernement est une guerre raciste, en premier lieu contre les personnes d’origine musulmane mais elle vise en dernier ressort l’ensemble de la classe ouvrière. Le parlement a adopté le 14 septembre la loi interdisant le port du voile intégral dans l’espace public, soi-disant pour défendre l’« égalité » des femmes, en réalité pour stigmatiser les minorités musulmanes comme étant l’« ennemi intérieur ». A bas la loi raciste contre la burqa !

Il faut stopper le démantèlement de l’éducation, du système de santé et des autres programmes sociaux, qui frappe avec une brutalité particulière les quartiers ouvriers et immigrés. Cela exige un programme de grands travaux pour construire ou reconstruire les logements, infrastructures de transport, écoles et lycées, hôpitaux et centres de santé que les capitalistes en faillite sont en train de liquider. Les capitalistes sont dans l’incapacité de répondre à de telles demandes dans leur ensemble, qui sont pourtant une question de survie pour le prolétariat, parce que leur système de production a pour but le profit qu’ils empochent, pas les besoins des travailleurs. C’est pourquoi les travailleurs doivent réaliser que c’est tout le système capitaliste qu’il faut abattre par une révolution ouvrière.

Pour l’indépendance des syndicats par rapport aux patrons et leur Etat !

Léon Trotsky, dans l’un de ses derniers articles, faisait remarquer qu’« il y a un aspect commun dans le développement ou, plus exactement, dans la dégénérescence des organisations syndicales modernes dans le monde entier : c’est leur rapprochement et leur intégration au pouvoir d’Etat » (« Les syndicats à l'époque de la décadence impérialiste », 1940). Il insistait que pour « transformer les syndicats en organes des masses exploitées et non en organes d’une aristocratie ouvrière », il faut lutter pour l’indépendance complète et inconditionnelle des syndicats vis-à-vis de l’Etat capitaliste.

Le taux de syndicalisation en France est l’un des plus faibles du monde industrialisé, avec seulement 5 % dans le privé. Et pour arranger les choses, il est de règle que la petite minorité syndiquée soit divisée, sur un même lieu de travail, entre plusieurs syndicats concurrents qui, trop souvent, ne respectent pas les appels à la grève de leurs concurrents. Les finances syndicales dépendent davantage des largesses de l’Etat capitaliste et des patrons que des cotisations de leurs propres membres, et la distribution de ces subventions est en grande partie liée aux résultats des élections professionnelles. Etant donné que tous les salariés prennent part à ces élections – et non pas les seuls syndiqués – la perspective des bureaucrates n’est pas de syndiquer davantage de travailleurs, mais seulement d’augmenter leur part du gâteau au détriment de leurs concurrents en ramassant le plus de voix possible lors de ces élections, qui sont organisées par l’Etat et les patrons.

Afin de surmonter cette division organisationnelle, il faut se battre pour forger des syndicats industriels regroupant dans un syndicat unique tous les travailleurs d’une même industrie, quels que soient leurs opinions politiques et leur statut. Cette lutte est indissociablement liée à la lutte pour construire une direction révolutionnaire de la classe ouvrière.

Tous les syndicats, notamment la CGT, FO et l’UNSA (mais aussi SUD et la CFDT) syndiquent des flics, des douaniers ou des matons. Ces bandes d’hommes armés qui exercent un monopole de la violence au service de la dictature de la bourgeoisie constituent le noyau dur de l’Etat capitaliste, lequel n’est rien d’autre qu’un instrument d’oppression de classe dirigé contre les travailleurs et les opprimés. La terreur des flics qui s’est déchaînée contre les piquets de grève et les jeunes des banlieues constitue une preuve bien physique de ce simple fait que la police est de l’autre côté de la ligne de classe. L’Etat bourgeois et ses bandes armées devront être détruits par une révolution ouvrière qui remplacera le pouvoir du capital par la dictature du prolétariat avec ses propres bandes armées. Celles-ci seront issues des milices ouvrières et autres gardes rouges construites dans la lutte pour défendre la classe ouvrière contre la terreur des fascistes et des flics. Contremaîtres, flics, matons et vigiles, hors des syndicats !

Reforgeons la Quatrième Internationale ! En avant vers de nouvelles révolutions d’Octobre !

Pour de nombreux travailleurs, l’intersyndicale des bureaucrates était un garant d’unité. En fait elle a permis aux bureaucrates de coordonner leur action sur la base du plus petit dénominateur commun et de cacher leur traîtrise derrière une façade « unitaire ». L’« extrême gauche » a rempli son rôle en faisant avaler la ligne de l’intersyndicale à des ouvriers impatients. Ainsi Lutte Ouvrière écrivait le 22 octobre à propos de la bureaucratie syndicale à la SNCF :

« L’attitude des directions syndicales a également conforté les grévistes. Jusqu’à présent, elles ont toutes poussé au renforcement, si ce n’est à l’élargissement du mouvement, contrairement à la politique qu’elles avaient eue en 2003 et en 2007, quand elles s’étaient opposées aux assemblées interservices, aux visites de grévistes à d’autres secteurs, voire aux manifestations communes. Le mouvement a ainsi retrouvé des accents de 1995, avec le fameux “Tous ensemble, tous ensemble”. »

LO « oublie » de mentionner que le « tous ensemble » de 1995 a été détourné vers l’élection du front populaire de Jospin – mais après tout, ce que les réformistes ont en tête aujourd’hui, c’est un nouveau front populaire.

Lutte ouvrière répète ces derniers temps que ce n’est pas avec des élections qu’on va changer quoi que ce soit et que la seule chose qui compte, c’est la lutte maintenant. Mais les mots ne pèsent pas lourd face à leurs actes, et ceux-ci ne font que contribuer à enchaîner les travailleurs au front populaire. Depuis deux ans LO fait partie de la majorité municipale dans un certain nombre de villes, où ils participent donc à l’administration de l’Etat capitaliste, y compris en votant pour le budget communal. Quand le maire communiste de Bagnolet, où LO fait partie d’une coalition sous l’égide du PCF, a ordonné l’expulsion musclée, l’hiver dernier, des habitants d’un immeuble occupé en partie par des travailleurs africains, LO a certes condamné cet acte raciste. Mais elle est traîtreusement restée dans la coalition à laquelle elle fournissait ainsi une couverture de gauche (voir le Bolchévik n° 192, juin 2010).

LO vient de s’inscrire sur la liste de front populaire pour les municipales de décembre à Corbeil-Essonnes, afin de « battre la droite ». Ils cherchent ainsi, aux côtés du PCF, du PS et des Verts, à gérer le capitalisme au niveau local, sur un programme dénonçant l’« échec sur le plan de la sécurité » de la municipalité de droite et annonçant que « nous y mettrons les moyens » pour changer cette situation – autrement dit davantage de flics racistes pour terroriser la cité des Tarterêts. A l’échelle nationale, les élections de 2012 se rapprochant, il semble que la prochaine alliance de collaboration de classes prendra une coloration rose-verte pour inclure des partis ouvriers réformistes comme le PS, le PCF et le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon aux côtés des Verts et autres forces bourgeoises (radicaux de gauche et chevènementistes en particulier).

Ce bloc de collaboration de classes peut compter sur le soutien électoral du NPA de Besancenot, issu en 2009 de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), elle-même social-démocrate jusqu’à la moelle. Avec la fondation du NPA, la LCR a abandonné explicitement trotskysme, révolution et communisme (qu’ils avaient déjà rejetés dans la pratique depuis plusieurs décennies), dans un rare élan d’honnêteté qui a exposé au grand jour à quel point ils sont imbibés du mythe bourgeois sur la « mort du communisme ». Ils ont aussi gravé dans le marbre de leurs « principes fondateurs » leur absence totale de scrupules à participer à un gouvernement bourgeois : « Nous contribuerons à leur mise en œuvre [de mesures progressistes] si les électeurs nous en donnent la responsabilité. » Lors des élections de 2007, Besancenot a clairement exprimé qu’il est prêt à intégrer un gouvernement bourgeois de coalition, à la « condition » qu’il s’autoproclame « anticapitaliste », déclarant que « la LCR prendra ses responsabilités dans un tel gouvernement. »

Au fil des décennies, la LCR a voté pour les candidats des différentes coalitions de front populaire, de Mitterrand à Royal en passant par Jospin. Aux élections municipales marseillaises de 2008 ils ont voté pour la liste socialiste, qui incorporait des politiciens du Modem de droite – ces mêmes socialistes qui viennent d’en appeler à l’Etat pour écraser la grève des dockers de Marseille ! Sachant que la LCR, son prédécesseur, avait voté pour Chirac en 2002 contre le fasciste Le Pen, on ne doit pas s’attendre à ce que le NPA hésite à voter pour un candidat PS, y compris le patron du FMI Dominique Strauss-Kahn qui a ouvertement soutenu les attaques de Sarkozy contre les retraites.

LO, NPA et autres ont en commun quelque chose de fondamental : ils rejettent la Révolution russe d’octobre 1917 et la dictature du prolétariat. Tous ont soutenu les diverses forces contre-révolutionnaires qui ont détruit l’Union soviétique et les Etats ouvriers déformés d’Europe de l’Est à la fin des années 1980 et au début des années 1990, et ils ont ainsi contribué, dans la limite de leurs modestes ressources, à la victoire de la contre-révolution capitaliste. La classe ouvrière doit se réapproprier le marxisme et les leçons de la Révolution bolchévique. La Ligue communiste internationale, dont la LTF est la section française, représente la continuité programmatique du parti bolchévique de Lénine et Trotsky ; nous luttons pour construire le parti ouvrier révolutionnaire internationaliste indispensable pour la victoire des futurs soulèvements révolutionnaires du prolétariat.

Adapté de Workers Vanguard n° 968, 5 novembre